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Science F(r)ictions

Les 10 romans de SF à (re)lire cet été

Publié par Laurent Chicoineau, le 1 août 2014   24k

Petite sélection très subjective de quelques romans et recueils de nouvelles de science-fiction à emporter avec soi dans les valises cet été.

1. Hypérion, Dan Simmons

A la fois classique et totalement moderne, le cycle d’Hypérion (Hypérion, La Chute d'Hypérion, Endymion et L'Éveil d'Endymion) résume et transcende à lui seul le genre SF. Voyages intergalactiques, space opera, luttes politiques sur planètes exotiques, civilisations technologiques – merveille que l’invention des fameuses portes « dis-trans » - résonnances culturelles et références littéraires (le poème éponyme de John Keats), bestiaire fantastique et écosystèmes improbables, Hypérion est un roman-univers à l’image d’œuvre comme Dune, de Franck Herbert. Incontournable pour les fans, il constitue une excellente introduction à la science-fiction pour ceux qui ne sont pas familiers de ces territoires, parfois étranges, de l’imaginaire…

2. Axiomatique, Greg Egan

Manipulations génétiques, modifications neuronales, réalités virtuelles, nanotechnologies, hybridations entre le vivant et les machines… autant de thèmes devenus classiques pour un courant de la science-fiction né dans les années 80 et baptisé « cyberpunk ». Australien et mathématicien de formation, Greg Egan se distingue pourtant du tout-venant de cette littérature de genre par son approche documentée et son refus des effets de style. Axiomatique, l’un de ses premiers recueils de nouvelles publiés en français, révèle la richesse et l’originalité de cet auteur qui ne recule devant aucune spéculation pour mieux nous inciter à questionner les dimensions imaginaires, culturelles et éthiques des « nouvelles » technologies dans notre univers quotidien. Lire Greg Egan, c’est se livrer à ce qui ne constitue, pour l’instant, que des expériences de pensée.

3. La horde du contre-vent, Alain Damasio.

Ce monde est balayé par les vents. Rituellement, un groupe d’humains – une horde – tente de remonter à la source de ces vents, « l’extrême Amont ». Sélectionnés et formés dès leur enfance pour cette mission éprouvante, les héros magnifiques de ce roman hors norme couronné par le Grand prix de l’imaginaire en 2006, vont développer une expertise et des pratiques de toutes les formes de vent connues et inconnues pour accomplir leur destin. Ecrit dans une langue subtile et originale, puisant dans un imaginaire riche et poétique, ce roman met en scène la complexité des relations humaines, où la rhétorique le dispute à la connaissance, la force brute à l’intelligence. Alain Damasio vit quelque part dans le Vercors, loin des turbulences de la ville.

4. La cinquième tête de Cerbère, Gene Wolfe

L’histoire des deux planètes sœur Sainte-Anne et Sainte-Croix conserve une part de mystère. Colonisées par les hommes, il semble que les populations autochtones aient complètement disparu. Cependant, selon certaines théories, les indigènes possédaient la capacité de changer de forme à volonté. Ils se seraient ainsi transformés en humains, afin de survivre parmi eux. On dit même qu’ils auraient complètement remplacés les colons… C’est dans ce contexte qu’un jeune ethnologue, le Dr Marsh, vient faire ses recherches. Composé de trois longs textes stylistiquement très différents, tels des fragments d’un vaste dossier incomplet, cette œuvre de l’excellent et pourtant méconnu écrivain américain Gene Wolfe compte parmi ces rares lectures qui résonnent en vous de longues années encore après avoir refermé le livre… A découvrir sans plus tarder !

5. Substance Mort, Philip K. Dick

Inspecteur à la brigade des stupéfiants, infiltré dans le milieu des toxicomanes sous une fausse identité, Fred est un jour chargé par ses supérieurs d’enquêter sur un certain Bob Arctor – qui n’est autre que le pseudo qu’il s’est choisi pour vivre parmi les trafiquants ! Comment enquêter sur soi-même sans devenir complètement schizophrène dans un monde où réalité et imaginaire se confondent sans cesse sous l’effet de drogues hallucinogènes comme la substance M ? Bien avant le 11 septembre 2001 et la promulgation du patriot act, Philip K Dick n’a cessé de décrire une société américaine en proie à la paranoïa généralisée. Dans ce roman, adapté de manière assez originale au cinéma (A scanner darkly), il s’interroge sur la capacité d’un individu à vivre plusieurs vies en simultané, sans perdre la raison. Il imagine aussi quelques innovations technologiques comme le « complet brouillé », vêtement « intelligent » qui affiche en permanence des couleurs et formes de vêtements standards, afin de fondre littéralement celui qui le porte dans la foule, sans pouvoir l’en distinguer...

6. American Gods, Neil Gaiman

Lorsque les premiers colons d’Europe sont venus peupler le continent Nord-Américain, ils ont apporté dans leurs valises croyances, mythes et tous les anciens dieux saxons du Walhalla. Aujourd’hui, ces figures antiques sont combattues par les nouveaux dieux américains, ceux de la technologie et du consumérisme. American Gods nous raconte leur combat, au fil d’un roman à l’esprit rock, déjanté et plein de surprises ! Célèbre scénariste pour la bande dessinée (la série Sandman) et pour le cinéma fantastique (Stardust, voir bande-annonce), Neil Gaiman appartient à une nouvelle génération d’écrivains anglais qui mélangent les genres et réinventent SF et fantastique en remixant culture populaire et références mythologiques. Pour passer un bon moment sur la plage !

7. Des anges mineurs, Antoine Volodine

Antoine Volodine n’est plus considéré aujourd’hui comme un écrivain de science-fiction. C’est pourtant dans ce genre qu’il a débuté sa carrière dans les années 80. Il s’est même vu remettre le Grand Prix de la science-fiction française en 1987, pour son intrigant roman « Rituel du mépris ». Inventeur du post-exotisme, un genre littéraire qu’il définit lui-même comme « un objet poétique marginal et rien d’autre », Antoine Volodine publie « Des anges mineurs » en 1999. Ce texte polyphonique se déroule longtemps après la fin du monde. De très vieilles femmes jugent leur petit-fils qu’elles ont créé avec des chiffons et des formules magiques. Et ce petit-fils les a déçues. Dans l’atmosphère post-apocalyptique d’un monde en décomposition, parsemé des ruines des régimes révolutionnaires, chamanes, musiciens, et vagabonds se croisent entre rêve et réalité pour le plus grand plaisir du lecteur abasourdi. Dépaysement garanti !

8. Super-Cannes, James G. Ballard

Sur les hauteurs de Cannes, le nouveau parc d’activité Eden-Olympia accueille entreprises internationales et cadres à très haut potentiel. C’est dans cet univers bourgeois ultra-sécurisé que débarque le couple Sinclair ; Monsieur se remet d’un accident d’avion et Madame, pédiatre, vient remplacer le docteur du parc qui s’est donné la mort après avoir assassiné une dizaine de ses voisins. Sous le soleil méditerranéen, Paul Sinclair va alors percer petit à petit les secrets de cette communauté aux apparences trompeuses… Avec ce roman – qui n’est pas paru dans une collection SF – l’immense écrivain anglais James G. Ballard, pour lequel « la science-fiction est la seule véritable littérature du XXème siècle », nous propose une dystopie (le versant négatif d’une utopie) fortement ancrée dans une certaine réalité post industrielle hautement technologique…

9. Glyphes, Paul McAuley

Graffiti sur les murs de Londres

Sur les murs de Londres, un tagueur baptisé Morph, peint des graffitis capables de déclencher des micro-crises d’épilepsie chez Alfie Flowers, photographe de profession et héros de ce roman original. Pour comprendre ce phénomène, ce dernier s’engage alors dans une enquête mouvementée qui va le conduire dans le nord de l’Irak, au contact des populations Kurdes. Entre services spéciaux américains ou anglais et plongée archéologique dans les mythes anciens, l’écrivain londonien Paul Mc Auley, ancien chercheur en biologie végétale, et auteur du déjà très exotique roman Les diables blancs, nous entraîne dans une aventure passionnante sur le pouvoir des images sur le cerveau à travers le temps.
>> Lire l’interview de Paul McAuley à propos de la sortie de Glyphes sur Actus SF.

10. Une forme de guerre, Iain M. Banks

Nous sommes au 90ème siècle (!). Une forme de civilisation s’est imposée dans la Galaxie, on l’appelle « la Culture ». Elle est constituée d’humains, d’extra-terrestres, de robots, et d’intelligences artificielles. Cette civilisation repose sur la tolérance ; ses peuples refusent toute loi, toute hiérarchie, toute propriété. Et pourtant, pour imposer son modèle, la Culture n’hésite pas à déclarer la guerre… C’est dans ce décor - trop schématiquement résumé - que se déroule l’action d’Une forme de guerre. Pour échapper à une interception ennemie, un vaisseau spatial de la Culture s’autodétruit, juste après avoir émis un dernier message laissant supposer une découverte technologique de tout premier plan. La compétition s’engage alors entre les humains et leurs adversaires pour mettre la main sur cette nouvelle technologie… Ce space opera très original – on dit d’Iain M. Banks qu’il a renouvelé ce genre parfois caricatural de la SF – fait partie du Cycle de la Culture, série de romans indépendants qui méritent tous votre attention.

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Et vous ? Quels sont vos romans ou auteurs de SF favoris ? Partagez vos coups de coeur pour cette fin d'année 2012, et laissez-nous des commentaires !

Bonne lecture ;)

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Illustrations : les couvertures d'ouvrage viennent des sites des éditeurs. Ill. Hypérion by adamtinslay - Glyphes by Guilmay (Flickr).