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Enquêter en féministe sur le contrôle migratoire aux frontières

Conférence d'Elsa Tyszler dans le cadre du séminaire "Enquêter sur et avec le genre : une discussion interdisciplinaire" (2025-2026).

Cette intervention s’appuie sur un exercice de retour réflexif sur dix années d’enquête dans des espaces-frontières militarisés à des fins anti-migratoires. Elle propose d’un part, de regarder comment l’approche
féministe sur les différents terrains d’enquêtes a permis de rompre avec l’androcentrisme et l’aveuglement aux rapports de genre des études et regards sur les situations de frontières. D’autre part, l’idée est de relater comment l’imbrication des rapports de genre et de race (particulièrement), ont affecté, de différentes manières, les expériences de terrain et donc la collecte des données, et ont parfois fait émerger des questions de recherche inattendues. Le genre, l’âge et la casquette féministe de la chercheuse ont dans certains cas eu pour effet qu’on lui demande de « faire le sale boulot », en enquêtant sur des questions sensibles et relativement taboues, que d’autres chercheur·es, sur les mêmes terrains, ont préféré éviter. En ce sens, il s’agit aussi d’aborder la question de la violence épistémique. Enfin, cette présentation terminera peut-être sur la question des « séquelles » laissées par de telles enquêtes, menées en contextes ultra-violents, dans un contexte politique toujours plus brutal quant aux droits et aux vies des personnes du Sud global en exil.

L'intervenante

Elsa Tyszler est sociologue, chercheuse postdoctorale au Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris, équipe Genre, Travail et Mobilités (CRESPPA-GTM, CNRS – UMR 7217). 
Depuis dix ans, ses travaux mettent le genre au cœur de l’analyse des situations de frontières militarisées à des fins anti-migratoires. Ses recherches, toujours ancrées dans des projets de recherche-action, portent sur les liens entre frontières, contrôle des migrations, rapports de race, de genre, de sexualité et violences. Ses terrains ethnographiques sont situés aux frontières maroco-espagnoles et aux frontières intérieures françaises.

Entre 2022 et 2024 elle a participé, en tant que chercheuse principale, à une contre-enquête collective sur un massacre perpétué à la frontière Nador-Melilla (Border Forensics, Irídia, AMDH, 2024). Elle est actuellement chercheuse et instigatrice du projet de recherche-action ANR SOLIFRO (2024-2026), portant sur l’étude des rapports de pouvoir dans les pratiques de solidarité envers les personnes exilées aux frontières françaises.

Elle a coédité l’ouvrage The gender of borders. Embodied Narratives of Migration, Violence and Agency (Routledge, 2023) et est l’auteure du livre, issu de sa thèse, Se battre aux frontières de Ceuta & Melilla. Race, genre et contrôle migratoire (Presses Universitaires de Vincennes, 2024). Son dernier article, basé sur une enquête de terrain menée à l’aéroport Paris-CDG, s’intitule : In the factory of "migratory risk". Latin American women in the French air border regime (Frontiers in Human Dynamics, 7, 2025).