Twitter dans l’éducation : le témoignage de @jereerej

Publié par Jeremie Grepilloux, le 8 avril 2013   2.7k

Suite à son intervention dans les Ateliers de l’information, Jérémie Grépilloux a accepté d’évoquer pour nous la manière dont certains professeurs utilisent Twitter avec leurs élèves.

2007... Qu'il est loin le temps (non pas des cerises), mais de celui où je débarquais sur Twitter [ndlr : sous le pseuo @jereerej], tel un explorateur à la recherche d'un nouveau monde... Travaillant pour les universités de Grenoble, mes missions de veille et de sensibilisation des enseignants aux usages du numérique me poussent à chercher, tester puis adapter à l'enseignement, les outils offerts par le réseau. Comme de nombreux utilisateurs de ce nouveau service, mes premiers tweets étaient d'une valeur sans égale pour l'outil de flux informationnel qu'il allait devenir plus tard. ;-)

Testing Twitter Je teste twitter

— jereerej (@jereerej) 13 novembre 2007

C'était alors l'occasion, de faire des rencontres avec d'autres explorateurs(trices), pionnier(e)s, qui allaient vite devenir de belles références en matière de TICE [ndlr : Technologies de l'information et de la communication pour l'enseignement]...

A noter également, que la langue anglaise semblait plus porteuse en terme de diffusion de l'information, la communauté francophone étant encore peu nombreuse et surtout très professionnelle.

Twitter, finalement, c'était l'occasion de crier au monde entier, ce que l'on était en train de faire, mais de façon plus « sérieuse » que sur son profil Facebook.

trying to import Scorm tests into my LMS... :) -- jere

— jereerej (@jereerej) 25 mars 2008

Avec plus de 900 millions d'utilisateurs dans le monde, Twitter est passé du statut d'outil « underground » (à l'échelle mondiale quand même) à celui d'« incontournable » grâce, pour beaucoup, aux médias traditionnels qu'il a contribué à faire rebondir en termes d'audimat et de fidélisation d'auditeurs / téléspectateurs.

Décrié à ses débuts par les professionnels de l'information, il a fallu attendre des expériences telles que 8-clos pour démocratiser (dé-diaboliser ?) l'usage de ce média social et lui accorder un certain crédit  dans la diffusion et le relais de l'information.

Depuis, grandes marques, professionnels de l'information, médias mais aussi particuliers sont présents sur le réseau pour, selon les cas, gérer leur image, communiquer, informer ou s'informer.

Enfin, c'est en pédagogie que l'usage de Twitter semble se développer à l'instar des expériences menées depuis 2009 par Laurence Juin (@frompennylane) dans le secteur du secondaire, celles de François Lamoureux dans le primaire ou encore d'Eric Delcroix (@erdelcroix) dans le supérieur. C'est, à l'heure actuelle, presque 300 « twittclasses » que l'on peut recenser au niveau national.

Mais l'expérimentation ne se fait pas sans heurts avec par exemple, le refus des institutions de permettre à des enseignants d'utiliser le média social comme outil pédagogique (cf.  la décision du rectorat local de clore le compte pédagogique d'une twittclasse en Haute-Savoie en 2012).

Twitter en éducation, pour quoi faire ?

Un tel détournement de l‘outil à des fins pédagogiques n’a pour seules limites que l'imagination de l'enseignant à intégrer les médias sociaux et leur efficacité constatée dans le processus d'apprentissage. Ainsi, on retrouvera des professeurs des écoles utilisant Twitter pour faire produire du texte, de la poésie à leurs élèves ou bien encore échanger avec d'autres classes en France ou à l'étranger.

 

J'ai vu un cheval avec des jambes en saucisse et des sabots en cornichons.#poissondavril #Ambre #Célia #Laura

— classedelaetitia (@classedelaetiti) 2 avril 2013

 

J‘ai vu un poisson pané qui faisait le fou dans une casserole. (Mélissa et Thibaut) #poissondavril

— Ecole de Remollon (@EcoledeRemollon) 2 avril 2013

 

C'est aussi, à l'instar de cette classe de CE1-CE2 à Gaujacq dans les Landes dont le compte Twitter compte presque autant de followers qu'il y a d'habitants dans la commune, l'occasion de mettre en valeur l'usage d'outils TICE utilisés par les enfants :

Voici la carte mentale sur les homophones et/est. #Romain twitter.com/CE1_CE2_gaujac…

— CE1 CE2 de Gaujacq (@CE1_CE2_gaujacq) 22 mars 2013

« Par les enfants, pour les enfants » pourrait-on résumer.

Dans le contexte de l'enseignement supérieur, ce sont d'autres usages que Morgan Magnin (@morgan_it) propose sur son blog : suivi de projets ou de travaux de fin d'études, soutien du présentiel, contacts et échanges avec les anciens étudiants et renforcement de la vie d'une classe.

En tant qu'intervenant dans des Masters et Licences, l'usage de Twitter m'a permis non seulement de trouver un outil de veille puissant et rapide, mais également de prolonger les formations en dehors des heures de cours, en permettant d'alimenter en information et ressources, le contenu de mes cours présentiels.

De même, il permet aux  étudiants eux-mêmes, de participer à l'enrichissement d'un cours (de façon complètement volontaire et spontanée) en proposant des liens tournant autour de la thématique de la formation ou en relayant l'information proposée par l'enseignant.

Et du côté de Grenoble ?

J'ai eu l'occasion de discuter avec Thierry Soubrié, enseignant-chercheur à l'Université Stendhal, de son projet de « Twittlinguistique » en Sciences du Langage pour des L1.

Pour Thierry, l'usage de Twitter doit servir à « faire évoluer les rapports que les étudiants entretiennent : à l'apprentissage, à la relation pédagogique et aux contenus de la formation ».

Il ajoute : « Apprendre, c'est travailler en dehors des cours, (co)construire des connaissances, établir des liens avec des connaissances antérieures et s'accommoder d'une expérience d'apprentissage nouvelle.» En ce qui concerne la relation pédagogique, Twitter « permet de considérer l'enseignant comme un partenaire dans l'apprentissage, ce qui convient d'accepter une certaine horizontalité dans les échanges ».

Alors, quelles sont vos impressions ? Comment avez-vous trouvé les questions du partiel ?

— UGR3LGS1 (@UGR3LGS1) 9 novembre 2012

Ainsi, sans ré-organiser de fond en comble le cours, les activités sur Twitter consistent en deux ou trois tâches à réaliser pendant la semaine. « Partez à la recherche de mots qui, dans une langue étrangère, n'ont pas d'équivalent strict en français » par exemple.

Le projet a bien fonctionné dans le sens où « les tweets étaient en relation directe avec les tâches proposées et souvent pertinents ». Suite à une enquête post cours, les étudiants ont déclaré « que ce travail a permis que s'instaure une certaine proximité avec l'enseignant » et Thierry d'ajouter « moins officiel que l'e-mail ! ».

Enfin, si c'était à refaire, il envisage une plus forte intégration de l'outil dans le process d'apprentissage : « prévoir une courte formation technique, dès la première semaine de cours, Twitter en effet étant très peu utilisé par les étudiants français. Il faudrait également l'inclure dans les modalités de contrôle des connaissances et en parallèle des tâches, encourager les étudiants à utiliser Twitter à d'autres fins : veille, poser des questions, échanger, etc. »

Et vous, quelle est votre expérience de Twitter dans l’éducation ?

>> Illustrationssuperkimbo (Flickr, licence cc)