L’escrime … technique de pointe !

Publié par Laurent Bonnot, le 25 novembre 2013   4.8k

En octobre dernier, le Village des sciences de Grenoble accueillait le GUC-Escrime à la Fête de la science. Laurent, le président du club, nous explique l'intérêt de ce sport d'un point de vue technique.

Le dimanche 13 octobre dernier, le GUC-Escrime a proposé aux nombreux visiteurs venus à la halle Clémenceau pour la Fête de la science, une exposition montrant les liens étroits entretenus entre l'escrime et les progrès scientifiques. En effet, dès ses origines, l’homme a dû faire appel à son intelligence afin d’inventer des armes pour subsister. Elles furent successivement en bois, en pierre et en métal.

Les épées de l’âge du bronze (alliages cuivre-étain) règnent 3000 ans avant d’être brisées par les lames en fer apparues vers l’an -1000. Ces lames sont en fait déjà en acier, obtenu par re-carburation du fer avec des gaz de combustion et du charbon de bois. La proportion de carbone, comprise entre 0,02 % et 2 % en masse et la succession des traitements thermomécaniques déterminent leurs principales propriétés mécaniques.

Les armes sont lourdes, la loi du plus fort régit les combats, mais l’évolution empirique des techniques de forge permet la fabrication d’armes de plus en plus légères. Les artisans de Tolède inventent ainsi la rapière au milieu du XVe siècle. Cette arme plus légère et au centre de gravité proche de la main permet aux espagnols de développer de nouveaux systèmes de combats très efficaces fondé sur des attaques en pointe très "mathématiques" (les « bottes »).

Les solutions techniques passent les frontières : les italiens établirent au XVIe siècle les bases scientifiques de l’escrime moderne (traité d’Agrippa de 1553), les français créent un siècle plus tard la lame de section triangulaire à pans creux pour les fleurets. La légèreté de cette nouvelle arme de salle permet de se défendre par la seule rapidité du mouvement. La main gauche, qui servait autrefois à tenir la dague, sert dorénavant de balancier et est placée derrière soi, au niveau de la tête. C'est le tout début de l'école française.

Cette invention puis celle du masque en treillis métallique à la fin du XVIIIe siècle permirent de découvrir toutes les possibilités techniques et tactiques de l’escrime et de donner aux divers mouvements toute la force et la vitesse imaginables. L’étude des mouvements et des efforts effectués par l’athlète fait l’objet de recherches dans des laboratoires de bio-mécanique, comme nous pouvions le voir sur une vidéo présentée sur le stand de l’Office Municipal des Sports.

Mais revenons aux métaux : l’approche scientifique de la physique des matériaux et de l’industrie métallurgique a permis d’inventer toute une gamme de lames en aciers spéciaux adaptés à l’escrime sportive. Les meilleures sont actuellement fabriquées en acier « maraging » offrant une importante résistance et dureté tout en gardant une bonne ductilité (capacité à se déformer sans se rompre). Leur résistance est liée à la présence de précipités inter-granulaires. Les progrès de la métallurgie ont ainsi permis le développement d’une escrime de pointe où tactique et technique priment sur la force, puis son passage du domaine guerrier au domaine sportif.

La première compétition d'escrime eut lieu en 1893. Les coups étant portés à une vitesse fulgurante, les juges étaient parfois incapables de prendre des décisions équitables. La machine à signaler les touches fut inventée par le célèbre magicien Robert Houdin. Elle fut commercialisé à Paris en 1926 sous l’appellation « épée électrophone ». La signalisation électrique des touches en compétition officielle a été adoptée en 1936 pour l’épée (cas le plus simple), en 1956 pour le fleuret et 1988 pour le sabre. Les appareils modernes sont équipés de microcontrôleurs, de télécommandes infra-rouges et d’afficheurs à LEDs très lumineux consommant peu d’électricité.

Depuis 2008, dans les grandes compétitions internationales, les armes communiquent avec l’appareil central par liaison radio (« bluetooth » 2.4GHz adapté aux courtes distances). C’est l’aboutissement de longues recherches pour résoudre les problèmes de transmissions, d’interférences, de masses, des touches valables ou non valables. Le premier appareil « sans-fil » à prix accessible a été introduit cette année, visant le marché des salles polyvalentes non équipées.

Nous pourrons peut-être montrer ce type d’appareils à la prochaine Fête de la science. Cette année nous avions installé une piste électrique « classique » pour les démonstrations et avons utilisé des kits « premières touches » pour initier les 90 enfants qui sont venus nous voir. Les salles Hoche et Berthe-de-Boissieux que nous utilisons à Grenoble sont appareillées. Alors n’hésitez plus, optez pour une activité physique intelligente et ludique, venez croiser le fer à Grenoble avec le GUC-Escrime !

>> Pour plus d'informations : consultez le site du club

>> Illustrations : Laurent Bonnot