Quand le sport devient une addiction

Publié par Morgane Taillandier, le 31 octobre 2019   1.4k

« Un défi contre soi-même ». Voilà ce qui pousse chaque année des milliers de coureurs à prendre le départ de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc à Chamonix, et à parcourir 171 kilomètres à travers les montagnes. La plupart de ces femmes et ces hommes n’ont qu’un seul but, arriver au bout, quoi qu’il arrive, quitte à perdre leur lucidité. Quand dépasser ses limites revient à se mettre en danger.

Cette passion pour le trail running nous pousserait-t-elle à faire toujours plus ? Toujours plus longtemps, plus vite ? Sûrement ! Mais cette envie de surpassement modifie petit à petit la physiologie de notre cerveau qui s’adapte à ce que le corps lui propose. Toutes les addictions fonctionnent de la même manière, elles sont un dérèglement du circuit de la récompense. Ce circuit régule nos envies, telles que la soif ou la faim, et nous conditionne à répéter ces actions qui déclenchent la récompense, la satiété par exemple. C’est exactement le même processus qui se produit lors d’une activité sportive.

Dans notre cerveau, la satisfaction de nos besoins est déterminée par l’aire tegmentale ventrale qui libère la dopamine, un neurotransmetteur qui génère la sensation de plaisir. Une personne addicte aura besoin de ressentir cette sensation, même si des conséquences négatives en découlent. Elle sera donc incapable de contrôler ce comportement.

Une addiction engendre la libération de plusieurs hormones : l’adrénaline, molécule du stress et des sensations fortes, les endorphines qui soulagent la douleur, la sérotonine qui régule l’humeur de manière positive, et enfin la dopamine, hormone du plaisir et de la récompense. De nos jours, la recherche de la satisfaction est devenue une pression à laquelle il est difficile d’échapper. Comme si nous devions toujours nous dépasser pour gagner en estime de soi, et pour satisfaire nos familles, amis et «followers» sur les réseaux sociaux, pour les rendre fiers de nos accomplissements et ainsi nous sentir exister. C’est ce que de nombreux coureurs recherchent aussi en s’engageant sur les sentiers d’un trail.

Et arrêter de courir ne serait pourtant pas la solution. En effet, en cessant la pratique intense d’une activité sportive, le cerveau d’un coureur addicte ne fonctionnerait plus de manière convenable et ses émotions deviendraient incontrôlables. L’individu en « état de manque » aurait alors un comportement semblable à celui d’une personne en cours de sevrage.

Trouver un compromis pour n’avoir que les effets positifs du sport, là est l’enjeu des Ultra-trailers en quête du surpassement éternel.

Morgane Taillandier