Communauté

Humagora

Conférences

L'esthétique incarnée en contexte artistique : définitions, enjeux, applications

Ces rencontres internationales, co-organisées par l'UMR Litt&Arts, ont pour ambition de faire connaître la ligne de recherche, d’expérimentation et de création de l’esthétique incarnée.

Fruit d'un partenariat entre les départements de philosophie et d'arts du spectacle de l'Université Grenoble Alpes, ce projet de recherche en création lauréat de la SFR Création est porté par Alice Dupas et Denis Perrin (IPhiG), Laura Fanouillet et Gretchen Schiller (UMR Litt&Arts). Il a pour ambition de faire connaître la ligne de recherche, d’expérimentation et de création de l’esthétique incarnée. Conférences, performances et workshops de Practice based research seront associés, pour mieux situer ces rencontres internationales à l’intersection de la pratique et de la théorie, de la philosophie et des arts de la scène.

L’esthétique incarnée que nous souhaitons mettre à l’étude et à l’épreuve dans ces rencontres internationales s’entend dans le sens d’une esthétique incarnée forte, qui implémente l’esthétique au-delà du corps cérébral redéfini en un corps sentant, vivant et actif. Cette approche procède d’une théorie générale de la cognition appelée cognition incarnée qui désintellectualise la cognition, au sens où elle ne la considère pas comme étant de part en part intellectuelle et lui reconnaît des dimensions émotionnelle et sensorielle essentielles. Nous souhaitons interroger la conception esthétique qui s’appuie sur ce cadre théorique général, et en particulier les effets et les enjeux de cette esthétique incarnée sur le processus artistique : de la création à la réception d’une œuvre ou d’une performance, en passant par l’élaboration et la transmission d’une pratique. En ce sens, nous souhaitons nous concentrer sur une esthétique incarnée dont la prétention est de rendre compte d’une expérience artistique, afin de soutenir, d’une manière générale, que le corps n’a pas uniquement pour fonction de transmettre du contenu informationnel au cerveau, mais, au contraire, de contraindre, de déterminer et de réguler ce contenu, dont il est aussi le porteur signifiant. Le corps, avec ses sensations, perceptions, affects ou encore sa physionomie propre, est ainsi le principal acteur de l’expérience artistique. Il en résulte que c’est la réalité corporelle de cette dernière qui en justifie les spécificités : le plaisir incarné qu’elle procure, la signification spontanée de l’œuvre dont elle est le vecteur, et peut-être aussi le sentiment de beauté, voire de sublime avec lequel on peut la confondre. La définition la plus générale que l’on puisse donner de l’esthétique incarnée forte pour l’expérience artistique est donc celle-ci : c’est une théorie qui ne détache plus cette expérience du travail du corps et qui affirme que les processus cognitifs mobilisés sont, en partie au moins, constitués par des structures et processus extra-neuraux.

Dans le champ de l’esthétique incarnée, c’est le phénomène de réception artistique qui a été le plus étudié. Une attention particulière sera ainsi portée à la manière dont le spectateur, qu’il conviendra peut-être de redéfinir en un specta-acteur ou en un participant, appréhende une œuvre d’art ou une performance. Comment cette approche incarnée du corps se traduit-elle concrètement dans le processus de réception artistique ? Lorsque ce dernier est revendiqué incarné, c’est le plus souvent parce qu’on l’estime indissociable, certes bien sûr d’un corps extra-cérébral, c’est-à-dire indissociable des propriétés fondamentales du corps sentant, vivant et actif, mais aussi comme indissociable d’un environnement avec lequel elle entre activement en interaction. Ce faisant, le phénomène de réponse artistique incarnée que proposent par exemple Scarinzi, Crowther, Tschacher, Shusterman, Trentini, Johnson, Noë, Gallese ou Di Dio n’est que rarement une expérience purement incarnée au sens étroit d’une liaison essentielle du système cognitif avec un système biologique vivant auto-organisé, auto-poïétique et autonome. Chez Shusterman par exemple, la réponse artistique est une véritable praxis corporelle qui fait du corps esthétisé un « lieu d’expérience et de signification » dans l’action. Chez Crowther, la réception d’une œuvre est incarnée, notamment en raison de la réciprocité ontologique qui se joue entre le participant et le monde dans une perspective écologique. Chez Gallese, Di Dio, Freedberg, Calvo-Merino ou encore Ticini, la réponse artistique est, en partie, incarnée dans la mesure où elle met en activité les centres cérébraux de l’activité sensorimotrice. Chez Noë, la réponse artistique est incarnée car elle est fondamentalement perceptuelle ; et la perception étant une action, la réponse artistique est elle-même considérée comme telle. Chez Scarinzi, on trouve une théorie elle aussi active de la perception esthétique et, plus largement, une approche non seulement incarnée, mais aussi contextuelle et dynamique de la réponse artistique.

Ces rencontres internationales, en associant conférences et workshops en recherche-expérimentation, portent ainsi trois ambitions principales :

  1. tenter d’apporter une ou plusieurs définitions de l’esthétique incarnée, qui demeure un champ extrêmement hétérogène en raison de sa jeunesse ;
  2. envisager et sonder les différentes applications de la théorie générale de l’esthétique incarnée dans le milieu artistique – vivant, visuel, littéraire, performatif, etc. ;
  3. expérimenter les enjeux de l’esthétique incarnée, notamment pour comprendre le fonctionnement du processus artistique, depuis la création jusqu’à la réception, en passant par la transmission d’une pratique.

En pratique

Inscription obligatoire aux workshops : lien Weezevent.
Pour participer à distance :
– Lien Zoom
– ID de réunion : 948 6623 6613
– Code secret : 622561

Lieu : MaCI, 339 avenue Centrale, Domaine universitaire de Saint-Martin-d'Hères, Amphithéâtre pour les conférences et Live Arts Lab pour les workshops.