Conférences

Les hiéroglyphes des écrivains : savoirs et imaginaires, XIXe-XXe siècles

Par Daniel Lançon, professeur de littérature française, Université Grenoble Alpes

Résumé : Alors que le discours tenu sur l’écriture égyptienne porte encore bien souvent au début du siècle sur les anciennes allégories sacrées, la découverte de Champollion en 1822 marque à l’évidence une rupture épistémologique. Trois démarches entrent dès lors en concurrence : celle des « savants austères », linguistes égyptologues, dont la science va progresser au fil du siècle jusqu’à permettre la création de corpus littéraires authentiques proposés à la lecture en traduction française mais dont les avancées sont contestées pendant une trentaine d’années ; celle de mythographes « égyptosophistes » prétendant à la vérité des signes d’une langue symbolique primitive ; celle des écrivains de vocation dont l’impossible mission de remotivation du signe ne va cesser de croiser une pensée des « hiéroglyphes » envisagés littéralement ou métaphoriquement.

Le conférencier se propose de présenter l’évolution de cette coexistence conflictuelle au fil des temps, en lien avec le statut d’un imaginaire de la connaissance linguistique et pré-linguistique, comme hors sémiotique de langage réellement parlé. L’accent sera placé sur les conceptions de l’acte littéraire, plus spécifiquement de l’acte poétique dans la seconde moitié du siècle. La poésie romantique puis surtout symboliste se serait-elle donnée pour « mission » de récupérer les prestiges de cette langue abolie et de renouer avec des modes de penser antérieurs ? Si oui, comment s’exprime cette résurgence dans les œuvres littéraires ?