Cycle Space Opera #10 - Place à la relecture critique

Publié par Marion Sabourdy, le 7 mai 2018   1.7k

En 2017 et 2018, le Labo des Histoires Auvergne-Rhône-Alpes propose une saison intitulée "Raconte-moi le futur". Dans ce cadre et parmi d'autres ateliers et événements, le Labo s'est associé à La Casemate pour proposer un cycle "Space Opera", animé par l'auteure de science-fiction Li-Cam. Je vous propose de suivre ce cycle à travers une série d'articles publiés au fil de l'eau (compilés dans ce dossier). Pour cette dernière séance, place à la relecture critique de nos premiers chapitres !

C'est déjà la dernière séance de ce cycle space opera ! Pour ne pas laisser les auteurs en herbe démunis face à leurs premiers textes et surtout leur futur manuscrit, Li-Cam a souhaité évoqué la relecture et la réécriture ! 

Voici le premier conseil donné par l'auteure : "prendre du recul sur ses écrits", en suivant ces étapes :

  • Ecrire d'une traite le premier jet de son roman
  • Éventuellement réaliser quelques petites modifications pendant la rédaction (mais pas trop : l'objectif est de terminer son manuscrit)
  • Laisser son premier jet dans un tiroir, pendant une durée de 15 jours à 3 mois : c'est une période de latence qui vise à prendre du recul
  • Pendant la "période du tiroir", proposer le manuscrit à la relecture à un ou plusieurs lecteurs de confiance
  • Après la mise au tiroir, procéder à une relecture visant à repérer les incohérences, les longueurs, les répétitions, les variations de style (normales sur un premier jet car il dépend de ses émotions, de son humeur du jour...), les passages moins fluides, les problèmes de rythme, etc.

Ceci étant dit, on peut se demander ce qu'est une relecture critique. Il peut s'agir d'une lecture à voix haute pour contrôler le rythme et la mélodie du récit. Les auteurs sont incités à faire attention à différents points de vigilance : répétitions, structure de phrase trop similaire, varier la longueur des phrases, allitérations…

Li-Cam cite ensuite les points d’amélioration possibles :

  • Etre attentif à l’équilibre entre les phases d’action, de description, d’introspection et de réflexion... et les dialogues
  • Dynamiser le récit, en supprimant les passages qui n’apportent rien à l’intrigue ou à la psychologie des personnages
  • Apporter de la "chair" en multipliant les points de vue, en se rapprochant au plus près des personnages, en insufflant des enjeux psychologiques ou sociétaux à l'intrigue
  • Veiller à la fluidité de la narration – éviter les passages trop didactiques (explications hors contexte) qui viennent rompre le rythme du récit.

En somme, un vrai travail de titan... "Cent fois sur le métier, remets ton ouvrage" nous prévient Li-Cam !

Relire, réécrire... en pratique

Pour bien comprendre ce qu'est réellement le travail de relecture / réécriture, Li-Cam distribue deux textes, écrits à partir d'une même trame, lors d'un atelier d'écriture : l'un a des problèmes de style, de structure, de fluidité et de cohérence et l'autre un peu moins (arriverez-vous à savoir lequel ?).

  

Les participants sont invités à lister les insuffisances dans le texte qui "pose problème". Selon eux, les pensées sont indiquées de manière grandiloquente, le style est assez ampoulé sans trop de maîtrise, le rythme est lent alors même que le passage est sensé être "dans l’action" et le texte est mal découpé (en effet, les paragraphes doivent faire ressortir les éléments importants et peuvent aussi donner au lecteur l’envie de lire la suite). L'autre texte peut bien sûr être amélioré, mais plutôt dans un deuxième temps, à l’échelle d’un directeur éditorial (et plus de l'auteur) car il manque encore des informations, on reste dans le flou, notamment en ce qui concerne le personnage de Lana, qui reste ignorée.

Ce type d’exercice - proposer à plusieurs personnes d'écrire une nouvelle à partir d'une même trame - est surtout utilisé chez les anglo-saxons. En France, les auteurs en herbe sont souvent un peu plus libres d’écrire à partir d’une contrainte générale. Les nouvelles créées via la technique anglo-saxonne se ressemblent énormément mais les meilleures sont celles qui arrivent à apporter des détails, tout un univers autour des contraintes...

De l'importance de l'entraide

Les participants ont alors lu et commenté mutuellement leurs amorces et leurs "bouts de textes". Le verdict tombe : “On aura moins tendance à faire les erreurs qu’on a remarqué”, “Au début on n’ose pas travailler la trame et ensuite on remarque tout”, “Pour remarquer toutes les incohérences il faut lire l’ensemble du texte”...

Le travail en groupe, les relectures mutuelles et les commentaires semblent porter leurs fruits : on est plus efficace à plusieurs, au moins pour ce qui concerne la relecture et la réécriture. Même s'il est compliqué de trouver de "bons relecteurs", cela reste nécessaire pour se débloquer, avoir du recul et progresser. "Pour ma part, je préfère que mon relecteur ne soit pas un grand lecteur : on voit tout de suite si ça lui plait ou non !" nous dit Li-Cam.

Pour aller plus loin, l'auteure évoque alors des groupes d’auteurs en herbe qui s’entraident sur leurs textes comme Cocyclics, elle-même faisant partie d’un groupe d’auteur nommé Zanzibar.

Et voilà, ce cycle de 10 séances, à mi-chemin entre atelier d'écriture et masterclass d'auteur, touche à sa fin. Les participants se quittent en se souhaitant de trouver le temps de poursuivre leurs manuscrits et pourquoi pas de s'aider à les relire et progresser ! Objectif atteint ! :)

>> Crédits : Jacques Mignon