Sylvie Su – « Je sais que je peux écrire toutes les bêtises que je veux, je pourrai les rectifier ou les gommer après »

Publié par Lorenzo Jacques, le 25 mars 2019   3.6k

"Les vents zonaux dans les fluides en rotation"



L’interview commence, et un critérium apparaît dans ses mains.

Tout ce qu’il y a de plus banal. Mais ce n’est pas l’objet dont elle veut nous parler, mais de comment elle l’utilise. C’est un crayon à papier, effaçable à l’infini, et donc sans aucune conséquence. C’est armé de ce critérium, et de la gomme qui y est associée, qu’elle lutte contre le syndrome de la page blanche, la hantise de tout doctorant. Dans ses propres mots, il lui permet de « libérer son potentiel connerie ». En plus de libérer sa plume, le critérium conserve une trace. Même après avoir effacé ses idées plusieurs fois de suite, elle peut replonger dans les vestiges de ses écrits. Différentes strates de pensée, qui lui permettent de se rendre compte de sa progression.

Mais pour elle, être doctorante ne signifie pas que rester enfermé dans un bureau, à plonger dans les profondeurs de sa propre pensée. Si Sylvie participe à Ma Thèse en 180 secondes, c’est surtout parce qu’elle considère que ça fait partie de son travail de chercheuse.

« Je considère que je suis payée avec de l’argent public, ça fait partie de mon rôle de dire aux gens ce que je fais ».

Mais quand elle fait sa présentation, elle ne s’adresse pas à un public sans visage. Avant tout, elle parle à ses amis, sa famille, leur explique à quoi elle passe ses journées. Le déclic a été un coup de téléphone avec sa mère :

« Allo Maman, ça va ? J’ai bien avancé sur ma thèse aujourd’hui, quelque chose s’est débloqué ! »
« C’est très bien ma chérie, mais franchement, ça ne m’étonne pas trop que ça ne marche pas, c’est un peu absurde ce que tu fais non ? »

« … »

Là, c’en était trop.

Sylvie a pris son critérium, et aussi sec, s’est inscrite à MT180, pour qu’enfin tout le monde puisse comprendre ce qu’elle bricole dans son laboratoire. Elle raconte sa thèse auprès de tous, mais surtout, elle la raconte à ceux qui n’y comprennent rien

Crédit Photo : Cindy  Shalaby