La Casemate en voyage dans l’espace-temps avec la Soirée Cult Interstellar
Publié par Audrey Korczynska, le 19 octobre 2022 1.1k
Le 30 juin 2022 à partir de 20h30, La Casemate organisait sa troisième Soirée Cult’ ! A cette occasion, les participants ont revêtu leurs combinaisons d’astronautes et parcouru les multiples dimensions de l’une des œuvres phares de Christopher Nolan, Interstellar.
Sorti en 2014, Interstellar est une incursion aux frontières de l’écoulement du temps mais aussi une fiction mettant en scène une humanité en quête de solutions face à une Terre condamnée. Le film a été régulièrement salué pour sa vraisemblance scientifique, assurée lors de l’écriture par les conseils du physicien et prix Nobel Kip Thorne. Mais qu’en est-il réellement pour les experts invités à intervenir lors de la soirée ?
Pourriez-vous devenir astronaute ?
Une trentaine de personnes ont été accueillies lors de l’événement. Mais avant de pouvoir s’envoler pour l’espace, elles ont dû passer un test d’astronaute ! Décrit par Tim Peake dans son livre “Objectif Astronaute - en 100 tests et exercices” il s’agissait de tester l’une des compétences nécessaires pour ces professionnels de l’espace : la visualisation spatiale… Visualiser mentalement un cube, dont l’une des face présente un point, puis suivre le mouvement de ce cube dans l’espace tout en restant concentré sur la position du point : vous vous en sentez capables ? Une poignée de personnes ont réussi à trouver la solution. Elles pourraient donc, comme les astronautes, s’orienter dans un environnement en apesanteur où les notions de haut, bas, gauche et droite, sont absolument relatives ! Bien entendu, ce n’est pas la seule compétence à avoir pour devenir un astronaute ! Les 80 candidats encore en lice pour accéder au poste proposé fin 2022 par l’Agence Spatiale Européenne le savent mieux que quiconque !
L’effondrement est-il pour demain ?
“N’entre pas docilement dans cette douce nuit”. Interstellar n’est pas qu’une odyssée spatiale. Entre une crise alimentaire et agricole, des tempêtes de sable, le film esquisse un futur sombre pour l’humanité. Il s’y joue un étrange rapport à la vérité où la nécessité de favoriser les carrières agricoles pousse l’école à enseigner que les missions Apollo étaient des impostures. Une forme de sobriété technologique a conduit la NASA à la clandestinité. Tout cela pour 2067. Mais l’effondrement est-il vraiment pour demain ?
Nicolas Géraud est politologue et sociologue de l’effondrement indépendant. Il a, entre autres, créé les Café Collaps’ à Grenoble, des ateliers, débats ou rencontres, pour aborder la collapsologie de manière scientifique et sceptique. Il a aussi, en partenariat avec le cinéma Le Club à Grenoble, proposé le festival REC-If dédiés aux récits de l’effondrement.
Sous le regard de Nicolas, le monde d’Interstellar s’avère finalement proche du nôtre. A l’opposé d’un Minority report, ici, très peu de gadgets ou avancées technologiques marquant une rupture avec le monde que nous connaissons. Avec TARS et CASE, le fantasme du droïde anthropomorphe est définitivement oublié. La Terre est en proie à une crise climatique face à laquelle chacun a recomposé son quotidien pour faire preuve d’adaptation. Dans ce monde qui s’effrite, la vérité s’est altérée et l’humanité se concentre sur sa survie. C’est un scénario qui semble plausible, encore plus à la lumière des derniers événements climatiques...
Cependant, la crédibilité de ce monde s’arrête vite pour notre intervenant ! Le film montre bel et bien la rupture du service rendu par la nature à l’être humain avec un retour massif à l’agriculture censé assurer l’approvisionnement en nourriture. Mais l’effondrement n’est pas total et le film glisse peu à peu vers une fresque spatiale où la figure de Cooper est centrale. Héros à la Maverick ou à la Ulysse selon les références, il embarque dans son sillage une humanité entière vers les étoiles pour sa sauvegarde. Une issue peu probable en vérité …
Rencontre avec Gargantua, une plongée dans la physique d’Interstellar
De la traversée du trou de ver à la dilatation du temps en passant par la manipulation de la gravité ou la découverte d’un tesseract caché au coeur du trou noir Gargantua, Interstellar se pose comme un voyage à travers l’espace-temps. Pur fruit de l’imagination de Christopher Nolan ou reflet fidèle des concepts de la physique moderne ?
Richard Taillet est enseignant à l’Université de Savoie Mont Blanc, directeur de l’UFR Sciences et Montagne, chercheur au Laboratoire d’Annecy de physique théorique (LAPTh) dans l’équipe d’astrophysique et de cosmologie. Il a pu nous donner quelques clés…
Pour écrire Interstellar et réaliser certains effets spéciaux, Christopher Nolan s’est appuyé sur les conseils de Kip Thorne, prix Nobel de physique en 2017. Certaines images, comme celle du trou noir, se trouvent donc être assez réalistes. D’autres en revanche, sortent tout droit de l’interprétation et de l’imagination de Nolan, comme c’est le cas pour l’expérience de Cooper dans le Tesseract !
Dans cette partie du film, la gravité agit à travers l’espace-temps. Le docteur Brand essaie aussi de résoudre une équation de gravité pour la maîtriser. En réalité, on ne peut pas modifier les lois de gravité mais on peut imaginer mieux la comprendre pour en tirer parti et développer de nouvelles technologies. De là à communiquer à travers l’espace-temps, on est encore loin…
Miller, Edmunds, Mann … existe-t-il une (exo)-planète idéale ?
Douze missions Lazare, lancées vers douze planètes pour vérifier leur habitabilité. Et parmi elles, trois planètes prometteuses : la planète-océan de Miller, le monde glacé aux nuages d’ammoniac du professeur Mann et la planète Edmunds… De tels mondes existent-ils vraiment ? Existe t’il une planète B, seul espoir d’une humanité condamnée ? A quoi ressemblerait-elle ?
Notre spécialiste du jour, Romane Le Gal, est astronome adjointe à l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Grenoble (OSUG-IPAG/IRAM/UGA). Elle s’intéresse à l’évolution physico-chimique des pouponnières d’étoiles jusqu’à la formation de système planétaire.
Une exoplanète désigne toute planète extérieure au Système solaire. Dans la réalité, les exoplanètes sont découvertes grâce à trois méthodes : la méthode d’observation directe, la méthode des transits, et la méthode des vitesses radiales. Les progrès technologiques des dernières décennies permettent d’en découvrir de plus en plus ! Depuis la toute première découverte en 1995, les scientifiques en comptent plus de 5000 et sont prêts d’en découvrir de nombreuses autres grâce à de prochaines missions et outils comme le James Webb Telescope (Nasa/ESA).
Les prochaines étapes pour les scientifiques seront de mieux connaître ces planètes et découvrir des marqueurs qui indiqueraient le potentiel pour qu’elles soient habitables… ce qui ne veut pas dire qu’elles soient habitées !
La fiction d’Interstellar est bien loin de la réalité ! Dans notre cas, la plus proche des planètes, Proxima Centauri b, se situe à un peu plus de 4 années lumières… à la vitesse de Voyager I, on mettrait 60 milles ans pour l’atteindre ! Il nous faudrait donc déjà pouvoir développer les fameux systèmes d’hibernation pour astronautes et des véhicules capables de beaucoup d’autonomie et de communication lointaines, très lointaines…
Des interventions… et des jeux !
Lors d’une Soirée Cult’, on apprend plein de choses grâce aux interventions d’experts mais on est également actif ! Des moments de jeux sont proposés pour rythmer la soirée. Pour cette fois, les participants ont pu tester leurs connaissances musicales en retrouvant le nom de chansons qui évoquent l’espace et de films dont la musique a été composée par le grand Hans Zimmer, souvent sollicité par Christopher Nolan.
Le quiz a permis à tous de se souvenir des éléments phare du film et de retrouver quelques autres films produits par Nolan.
Saviez-vous que la crise climatique et agricole qui touche le monde dans Interstellar est inspirée d’un événement réel ? D’après vous, lequel ?
- des apports de sables du Sahara dans le sud de l’Europe
- du “Dust Bowl”
- de l’éruption du Krakatoa
- du cyclone de Galveston
Peut-être est-ce la première fois que vous entendez parler du Dust Bowl ! Cette région des Etats-Unis située au croisement de l’Oklahoma, du Kansas et du Texas a été touchée par un phénomène de sécheresse et d’une série de tempêtes de poussière dans les années 1930. Ces événements ont été une catastrophe au niveau écologique et agricole.
La soirée en vidéo
Remerciements
Merci au soutien du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, à Instant Sciences ainsi qu’aux partenaires des Soirées Cult’ : La Rotonde, Le Dôme, Kimyo.
Les Soirées Cult’ c’est quoi ?
Imaginées par l’association Science Animation, les Soirées Cult’ sont des soirées animées et conviviales où l’on rencontre des experts pour décrypter des séries, films ou jeux vidéo phares du moment. Pour être tenu informé des prochaines soirées, abonnez-vous à la newsletter de La Casemate ! (Au pied du site www.lacasemate.fr)
Instants Cult’ : un compte Instagram pour décrypter la pop culture
Lancé courant octobre 2020 par Science Animation, le compte Instants Cult’ (@instantscult) décrypte chaque jour séries, films, jeux vidéo… pour explorer l’univers, apprendre des choses incroyables et jouer avec vos œuvres préférées.