Les fleurs de montagne poussent jusqu'en prison

Publié par Égalité des Sciences, le 13 février 2019   2.3k

Article rédigé par Elisa Pospieszny et Diane Mottet, étudiantes en Master Communication et Culture Scientifiques et Techniques de l’Université Grenoble Alpes.

Lundi 21 janvier 2019 se tenait une conférence scientifique sur les fleurs se développant dans des endroits inhabituels, dans un lieu justement... inhabituel : le centre pénitentiaire de Valence. 15 détenus ont ainsi pu assister à une conférence animée par Cédric Dentant, botaniste au parc national des Écrins, intitulée « La vie à l’extrême, les découvertes botaniques des expéditions en haute montagne ».

Diffuser les sciences en milieu pénitentiaire

Cette conférence animée par Cédric Dentant s’est déroulée dans le cadre des actions organisées par l’association Égalité des Sciences. 

Il s'agit d'une association proposant des actions culturelles scientifiques dont le but est de donner accès aux sciences, y compris en milieu carcéral. Elle fût initiée en septembre 2016 par des étudiants en Master Communication et Culture Scientifiques et Techniques de l’Université Grenoble Alpes et compte à ce jour plus d’une dizaine d’interventions en établissements pénitentiaires.

Les actions proposées aux détenus, que ce soit des conférences ou des ateliers, sont toujours accueillies avec enthousiasme et génèrent de nombreux échanges. Au-delà de la diffusion des connaissances, ces événements permettent de désacraliser les sciences et de faire prendre conscience aux détenus de leurs capacités afin qu'elles leur paraissent plus accessibles.

Un public captivé par Cédric Dentant

Pendant une heure, Cédric Dentant a pu leur parler de son métier, intimement lié aux montagnes et à l’altitude. Passionné par la transmission et le partage des connaissances scientifiques qu’il contribue à enrichir chaque jour par son travail, il aime l’idée d’offrir ces fleurs extrêmes à la société en retour de sa participation au financement de ses recherches. Il aborde ainsi ses découvertes botaniques dans des salles classiques, des refuges, des bars et maintenant dans des prisons ! 

En nous partageant son quotidien, qui balance entre les laboratoires dans lesquels il travaille sur un écran toute la journée, et les expéditions en milieu alpin où il se retrouve au bout d’une corde pour ramener des échantillons rares, le chercheur nous fait découvrir un monde encore méconnu : celui des plantes de haute altitude.


Cédric Dentant et Sébastien Lavergne, au cours de l'une de leur expédition en haute altitude

Ce métier peu conventionnel a suscité de nombreuses réactions dans le public et les questions ont fusé : “C’est vous sur les photos ?” “Vous êtes payé pour aller en haute montagne ?” “Comment vous entraînez-vous pour partir escalader aussi haut ?” “Comment gérez-vous les risques et le danger de telles expéditions ?” 

Rebondissant aux questions curieuses et parfois directes de son auditoire avec un plaisir palpable, Cédric Dentant a réussi à créer une ambiance chaleureuse pour faire pousser ses fleurs dans le centre pénitentiaire de Valence !  


Le public de détenus captivé par Cédric Dentant

Persuadé que “l’humain n’est pas fondamentalement déterminé par sa nature, que son environnement joue un rôle majeur et qu’il ne le choisit pas”, il répond avec passion à l’invitation d'Égalité des Sciences. Bien qu’il avouera plus tard une petite appréhension face à l’inconnu du public du jour, il fût finalement enthousiasmé par les discussions et l’intérêt émanant des détenus pour son travail. Il raconte se sentir grandi d’avoir osé se lancer dans une nouvelle aventure inconnue pour apporter “un peu d’oxygène scientifique dans un lieu difficile”.

Les plantes de l'extrême

Capables de pousser à plus de 6000 mètres d'altitude alors que la température est proche de celle qu'il fait à la surface de Mars, ces fleurs soulèvent bien des questions. Comment gèrent-elles les écarts de température ou encore leur reproduction ?

Saxifrage à feuilles opposées (Saxifraga oppositifolia)

Les chercheurs ont remarqué que de nombreuses plantes d’altitude poussent en forme de coussin. En mesurant la température dans ces coussins, ils se sont rendu compte qu’elle y est plus chaude dans les milieux très froids et plus froide dans les milieux très chauds. Autrement dit, les coussins permettent de réduire les variations de la température extérieure et de favoriser l’adaptation de la plante  à son milieu.


Mesure de la température dans un coussin en milieu chaud

La question de leur reproduction reste à ce jour énigmatique. En effet plus l’altitude est élevée, moins il y a d’insectes pollinisateurs pour assurer les échanges de pollen. Bien que ce problème semble résolu pour certaines plantes se développant à plus de 3000 mètres, altitude à laquelle une seule espèce de bourdon permet leur reproduction, le mystère reste entier pour les plantes situées au-dessus de 6000 mètres d'altitude.

Ce domaine de recherche florissant va ainsi certainement évoluer durant les années à venir, l’occasion pour Cédric Dentant de revenir pour nous tenir au courant !


Crédits photo : Cédric Dentant, Fabien Berrot, Fabien Anthelme, Nathalie Mantonnier (Centre Pénitentiaire de Valence)

Pour plus d’informations sur l’association Égalité des Sciences : https://www.echosciences-greno...

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