Une visite de l'OSUG par Julien, collégien

Publié par Julien Beautemps, le 3 mars 2015   3k

Dans le cadre d’un stage à La Casemate, Julien a visité l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Grenoble (OSUG). Il y a découvert plusieurs techniques d’observations astronomiques et de détection d’exoplanètes, qu’il nous raconte ici.

Ce matin du 18 décembre à 8h45, mal réveillé et enrhumé, je m’apprête à entrer dans l'OSUG (Observatoire des Sciences de l’Univers de Grenoble). Au programme : visite d'un laboratoire créé pour la fabrication et le test de matériel d'observation astronomique à haute résolution angulaire, c'est-à-dire permettant de donner une image très précise. Laurent Jocou, ingénieur au CNRS, accueille le petit groupe d’élèves de troisième, en stage d’observation à l’OSUG, que j’ai rejoint pour l’occasion. Il nous explique que les perturbations atmosphériques comme le vent, les nuages, l'humidité et les différences de température sont très gênantes pour l'observation, touchant par conséquent à la qualité de l'image.

Laurent Jocou devant les stagiaires de troisième venus visiter son laboratoire

Pour éviter ces perturbations, une optique adaptative est mise en place. Voici son principe : la lumière d'un objet céleste arrivant sur le miroir d'un télescope est altérée par la turbulence atmosphérique. Sa surface d'onde n'est plus plane mais irrégulière. On l'envoie donc sur un miroir déformable auquel on applique des déformations inverses. Ainsi, après réflexion sur ce miroir, la surface de l'onde retrouve sa planéité.

Une fois cette méthode décrite, Laurent Jocou en arrive à parler de l'interférométrie, utilisée pour les grands télescopes comme le VLT (Very Large Telescope) au Chili. Ce système consiste à remplacer le diamètre du miroir d'un télescope par la distance entre deux télescopes. "Impossible de fabriquer et d’utiliser un seul et unique miroir possédant un diamètre de plusieurs dizaines de mètres" nous précise l’ingénieur. "Si l'on veut grossir d’avantage l’image d’un objet céleste, il suffit de combiner les faisceaux de lumière captés par plusieurs télescopes en même temps". On obtient un signal que l'on décompose en « franges » grâce à des fibres optiques. A partir de ces franges, on reconstruit l’image que l'on aurait pu obtenir avec un télescope géant… mais fictif ! Dans le laboratoire de Laurent Jocou, les ingénieurs simulent des recombinaisons en miniature de faisceaux lumineux et testent le matériel destiné à être utilisé dans le VLT.

La visite de ce laboratoire touchant à sa fin, je quitte cette grande salle blanche encombrée de divers instruments et de machines pour monter à l'étage, assister à une présentation du célèbre astrophysicien Xavier Delfosse. Il débute avec des données très constructives sur notre Soleil, comme son diamètre (1 400 000 kilomètres), la température régnant dans son cœur (16 000 000 °C) et à sa surface (6 000°C), ses différentes couches visibles de la Terre (la photosphère, la chromosphère et la couronne), sa composition chimique (92 % d'hélium et 7 % d'hydrogène) ou encore ses taches. Le chercheur nous parle ensuite des instruments d'observation de « l'astre de nos journées », comme la chambre noire et la lunette, en passant par le télescope muni d'un filtre solaire qui réduit le flux de faisceaux lumineux, ce qui permet une observation non dangereuse pour les yeux.

Ensuite, Xavier Delfosse, aborde le sujet des exoplanètes, ces planètes tournant autour d’une autre étoile que la nôtre. Il nous décrit un des moyens de les détecter : celui des vitesses radiales. Cette méthode, la plus utilisée, implique l'effet Doppler-Fizeau. Vous avez sans doute déjà entendu la sirène des camions de pompiers : au fur et à mesure que celui-ci se rapproche, elle s'amplifie et devient plus aiguë puis, lorsqu’il s'éloigne, elle fait tout le contraire. Ce phénomène est appelé « effet Doppler-Fizeau ». Dans le domaine de la spectroscopie, le même phénomène entre en jeu au niveau des couleurs. En effet, chaque corps possède ce que l'on appelle un spectre d'émission. Comme son nom l'indique, un spectre d'émission est constitué des différents rayonnements émis par ce corps. Ce spectre contient des couleurs allant du violet au rouge avec des raies noires qui indiquent la composition chimique de l'objet. Si ces raies sont décalées vers le rouge, cela signifie que l'objet s'éloigne de l'observateur et si elles sont décalées vers le violet, cela signifie que l'objet s’en rapproche.

Le déplacement des raies sombres dans le spectre de l'étoile est la signature du mouvement de la planète et de l'étoile autour de leur centre de gravité

Dans le cas de notre système solaire, chaque planète tend plus ou moins à faire osciller le Soleil (voir image ci-dessus) et, par conséquent, les raies du spectre d'émission de notre étoile se décalent. Il se passe exactement la même chose pour les systèmes semblables au nôtre, c’est-à-dire comportant une étoile autour de laquelle tournent une ou plusieurs (exo)planètes.

Ainsi, pour détecter une exoplanète, on analyse d’abord le spectre de son étoile. Si ses raies spectrales se décalent, une ou plusieurs planètes tournent peut-être autour. En analysant plus en détail cette oscillation, on peut même donner la taille, la masse et la densité de ces exoplanètes, ainsi que sa proximité par rapport à l'étoile. Et, grâce à ces données, il est même possible de dire si les conditions à la surface de ces planètes seraient propices à la vie !!!

La méthode des vitesses radiales a d'ailleurs servi aux chercheurs grenoblois pour détecter la première exoplanète de même type que la Terre : Kepler 186f. Les conditions de vie à sa surface semblent bonnes. Rêvons un peu : peut-être qu'une espèce intelligente y prolifère ! Midi tapantes : me sentant plus intelligent, je reprends le chemin de la Casemate pour casser la croûte…

>> Crédits : European Southern Observatory (Flickr, licence cc), Marion Sabourdy, Observatoire de Paris / Emmanuel Pécontal