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Pierre Pollak et la naissance de la stimulation cérébrale profonde à Grenoble

Publié par Laurent Vercueil, le 3 mars 2016   7.6k

Dans le Monde daté du 29 février 2016, un article sur le discret Pierre Pollak, co-inventeur grenoblois de la stimulation cérébrale profonde.

Au milieu des années 80, Pierre Pollak, le neurologue et Alim Louis Benabid, le neurochirurgien, découvrent la possibilité de traiter le tremblement par la stimulation d'un noyau spécifique (le Vim) du thalamus, une structure profonde du cerveau.

A la même époque, des travaux fondamentaux, issue notamment du développement de nouveaux modèles de Parkinson chez le primate (les modèles "MPTP"), conduisent à considérer qu'une partie importante des symptômes de la maladie de Parkinson est liée à une activité excessive du noyau sous-thalamique, une structure de petite taille située, comme son nom l'indique, sous le thalamus.

Sur la base de ce qu'ils ont observé sur le tremblement, et qui suggérait que la neurostimulation à haute fréquence reproduisait les effets d'une lésion, Pollak et Benabid vont traiter les premiers patients parkinsoniens par stimulation du noyau sous-thalamique au début des années 90 à Grenoble. Les améliorations très spectaculaires qui seront observées vont rapidement convaincre la communauté neurologique mondiale de l'intérêt majeur de cette approche thérapeutique, lorsque le traitement médical ne suffit plus à maintenir la qualité de vie du sujet.

Aujourd'hui, partout dans le monde, des dizaines de milliers de patients sont traités par neurostimulation profonde, dans la maladie de Parkinson, mais également dans le cas d'autres maladies neurologiques ou psychiatriques résistantes aux thérapeutiques médicamenteuses. Tout au long des années 90 et 2000 (Pierre Pollak, Professeur de Neurologie au CHU de Grenoble, a quitté Grenoble pour Genève à la fin des années 2000), l'équipe de neurologie (1) de Pierre Pollak a étudié les effets de la stimulation cérébrale profonde chez les premiers patients, pour en apprécier les effets cliniques favorables ou défavorables, établir les modalités du réglage des paramètres de stimulation, affiner les observations cliniques et la gestion des thérapeutiques associés. Un pas en avant remarquable dans la prise en charge et le traitement d'une maladie très invalidante.

(1) Ici ma déclaration de conflits d'intérêts : j'ai eu la chance d'être associé plus ou moins directement à ces travaux au cours de mes débuts dans la carrière de neurologue. En 1993, jeune interne de neurologie, en me rendant pour la première fois à une réunion parisienne du "Club des Mouvements Anormaux", où Pierre Pollak présenta une vidéo du premier cas de stimulation du noyau sous-thalamique, vidéo qui époustoufla le public neurologique présent et déclencha les applaudissements (nous avions conscience de vivre un moment historique). En 1995, alors que je venais de Strasbourg à Grenoble en "inter-CHU" parfaire ma formation de neurologue dans son service, et où, jeune Padawan, j'assistais à la démonstration de son sens de la précision clinique. Enfin, pendant les trois ans de PhD, à partir de 1999, comme chercheur dans son équipe et sous sa direction, pour étudier la stimulation cérébrale profonde dans la dystonie. Chaque fois, un grand plaisir et un certain émerveillement.