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Comment faire du tourisme utile dans les Hautes-Alpes ?

Publié par Emilie Demeure, le 12 décembre 2020   3.4k

Nous sommes à la deuxième partie de ces journées pluridisciplinaires liées au programme de recherche MAESTRO. Nous allons pour cet atelier écouter deux acteurs sur le sujet « La mise en tourisme de la culture scientifique dans les Hautes-Alpes », Aurélien Rateau de l’association  Gap science animation et Vincent Martin de l’association Alpes là ! .

Après une courte présentation des acteurs, ces derniers répondront aux questions du public. 


Aurélien Rateau fait partie de Gap Science animation 05 (GSA 05)  qui est une association fondée en 1999. Visant un public large, l’association touche à toutes les possibilités d’activités, allant de l’exposition à la conférence en passant par des sorties encadrées. 

GSA 05 a un rapport relativement lâche avec le tourisme car il y a 20 ans c’était une association d’adhérents qui se sont rassemblés pour avoir un service à leur disposition (conférence, outils etc.), c’était donc un projet domestique avec très peu d’activité rentable. Puis, il y a environ 5 ans, l’association a changé de fonctionnement et valorise maintenant les activités et ateliers rentables, permettant ainsi à l’association de perdurer. 

Pendant la période estivale, l’association est contactée par les offices de tourisme pour proposer des ateliers. Avant c’était très marginal, mais maintenant la logique d’industrialisation va sans doute faire considérablement augmenter cette part accordée au tourisme. 


Vincent Martin de son côté, nous présente l’association Alpes là ! qui a moins de 3 ans. L’association a la volonté de créer un média qui diffuse des informations pour mettre en avant les initiatives  et montrer les transitions qui sont en cours dans les Alpes. 

L'association organise notamment des éco-traversées, ce sont des itinérances dans un massif alpin. Le but est de découvrir la montagne sous tous ces aspects. Au cours du projet est apparu l’intérêt d’avoir des scientifiques pour enrichir la traversée. L’itinérance est d’une semaine, au cours de laquelle des scientifiques, des acteurs de terrain (gardien de refuge, habitants en montagnes, …) et des artistes accompagnent les participants et partagent leurs savoirs. Il est important de faire des sciences en montagne pour l’immersion, permettant de développer une empathie avec la nature et de sensibiliser les personnes plus facilement. 

C’est maintenant au tour du public de prendre la main sur la suite de cette présentation. Voyons ce que les intervenants répondent :


Est-ce qu’on s’inscrit dans la pratique d’un tourisme qui a du sens et pas juste un tourisme de consommation ?

Vincent Martin : « Oui, on n’est pas une agence de voyage qui a pour but de vendre. Nous souhaitons que les participants soient acteurs et que l’éco-traversée ne soit pas juste descendante, du chercheur au participant. »

 

Est-ce que le tourisme change l’approche qu’on a de faire de la médiation scientifique ?

Aurélien Rateau : « Pas tellement car la réflexion sur les projets ne change pas. Il n’y a pas de distingo sur le produit et la façon de l’amener, autrement dit, l’offre que nous proposons n’est pas faite à la base pour le tourisme mais est simplement utilisée aussi dans ce cadre. »


Comment percevez-vous le tourisme scientifique en tant qu’acteur ? Est-ce que vous placez des jalons ?

Vincent Martin : « Il y a des limites oui !  Organiser une éco-traversée demande du temps. Aller en montagne dans un milieu peu ou pas aménagé va avoir un impact sur l’environnement. Lors d’une excursion avec 20 personnes, nous avons piétiné une tourbière et ça a eu un impact négatif sur celle-ci. » 

Aurélien Rateau : « Aujourd’hui on s’adresse au grand public. Il n’est pas spécialement là pour du tourisme scientifique mais nous proposons des activités dans ce sens. Les interventions que nous organisons sont l’occasion de rappeler les impacts qu’on a, de hiérarchiser les enjeux. »


Pour vous, quelles démarches devrait-on mettre en place pour sensibiliser le public scolaire aux enjeux environnementaux de manière plus participative ?

Aurélien Rateau : « Je travaillais pour le débat public, dans ce sens on a créé des kits pour les scolaires. On a eu beaucoup de difficulté à le partager parce que la notion de participation est difficile à mettre en place à tous les âges. Par exemple, une fois dans un lycée, un professeur ne voulait pas qu’on fasse un débat sur un parc éolien parce que dans son cours il doit dire que les énergies renouvelables sont bien. Avec les enfants, il y a une part créative. 

On fait porter une responsabilité énorme aux enfants parce que les adultes ne sont pas capables de faire ce qu’il faut faire. Il faut y aller doucement sur le message et que l’adulte ne se décharge pas de ce poids sur les enfants. » 


Étant donné qu’il n’y a que quinze participants pour l’éco-traversée. Comment les choisissez-vous ? 

Vincent Martin : « Plus de participants limite les échanges humains et alourdit l’organisation. On cherche à avoir une diversité des participants en termes de connaissance de la montagne mais aussi de parcours et d’expérience de vie. On a comme objectif de proposer plusieurs éco-traversées à l’avenir pour proposer différents niveaux de difficultés pour diversifier les personnes. »


Est-ce que vous avez déjà fait appel à un acteur local et non à un scientifique pour animer ?

Aurélien Rateau : « Oui lors du cycle de conférence sur la transition. On a fait des tables rondes avec des experts et des associations qui menaient des projets locaux. Il faut cependant être clair sur « d’où parle chaque personne. » »


Emilie DEMEURE


Pour aller plus loin : 

Le projet écotraversé : http://ecotraversee-alpes.fr/ecotraversee-de-belledonne-2020/

Gap sciences animation : http://gsa05.fr/fr/gsa-05/nos-statuts

Pour plus d’informations sur les journées d’étude « Culture scientifique et transition touristique : quels enjeux pour les territoires alpins ? » : https://maestro.hypotheses.org/1027

Un live tweet  a été réalisé par une étudiante du master CCST de Grenoble qui complète ce résumé, voici le lien : https://twitter.com/aliciaperino/status/1331153979259105280