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Mémoires du Futur

Du penser global à l'agir local

Publié par Jean Claude Serres, le 20 mai 2023   1.1k

Comment penser et construire un diagnostic global de notre situation ?

Comment en déduire des actions locales impliquant les habitants ?

Ce diagnostic devrait prendre en compte différentes problématiques ou ruptures sociétales : climat, pollution, numérique, violences, précarisation économique, effondrement de la pratique démocratique, etc. Ce diagnostic à construire est de type systémique car tout est en interdépendance.

Quelques réflexions méthodologiques

La réalisation d’un diagnostic global nous implique à prendre en compte un environnement complexe. L’élaboration des stratégies et leurs mises en œuvres en plans d’actions opérationnels, se doivent d’être efficaces (atteindre les objectifs), pertinents ( les bon choix) et en efficience (économie de ressources adaptée aux différents budgets concernés). La mise en œuvre d’un diagnostic d’action stratégique (D.A.S.), tel est le titre de ce cheminement, est évidement d’ordre politique. Les différentes problématiques (domaine climatique, domaine numérique, domaine sociétal etc.) imposent de penser de manière systémique, de penser-agir en complexité.


Cette introduction théorique et très difficile à comprendre, à intérioriser nous demande à avancer par petits pas pour pouvoir comprendre, partager, dialoguer et surtout s’engager en cohérence. Pour cela nous pouvons revisiter le sens de certains mots afin d’éviter la novlangue de l’ultra libéralisme comme celles des extrêmes, des partis politiques qui organisent la gouvernance aux différents étages des territoires. La novlangue est cet usage de communication qui tout et son contraire. Un exemple classique : un « plan social » est typiquement un plan de licenciement profondément anti social pour celui qui va se retrouver au chômage et désocialisé.


Politique :

J’utilise ce terme dans le sens suivant : la politique est l’ensemble des stratégies, des tactiques et des plans d’action opérationnels qui vont être mis en œuvre à l’issue de l’élaboration d’un D.A.S. C’est un vocabulaire utilisé dans les entreprises, les organismes publics et les instances gouvernementales. Pour exemples dans une entreprise on parlera d’une politique qualité ou d’une politique d’innovation, dans le gouvernement, d’une loi programmatique, dans un théâtre de la programmation annuelle. La politique dans ce sens est l’orientation stratégique. Pour une personne cela concernera le plan de développement de compétence, la formation initiale. Pour une famille ce sera la stratégie éducative ou la stratégie d’habitation.


Penser Global, Agir Local

Cette expression pourrait facilement appartenir à la novlangue. Par exemple le gouvernement penser et décide du DAS et les habitants obéissent et agissent. C’est typiquement ce qui s’est passé en mars et avril 2022 durant le confinement lié au covid 19. Cette expression peut tout aussi signifier le contraire. Chaque personne pense le global et décide d’agir individuellement. Cela peut caractériser une pratique de démocratie directe.


Pour moi, « Penser global et agir en local » est indissociable de l’agir global. Je préfère utiliser l’expression penser-agir en complexité. Tout acte individuel a des répercussions au global et vice versa (pensée systémique).


Que peut on comprendre par « global »? On peut prendre en compte l’ensemble des problématiques sociétales et leurs interactions. On peut considérer différentes échelles de temps (théorie de l’évolution, le développement de l’humanité, le siècle en cours, les 10 ou 20 prochaines années, la durée de vie d’une mandature, etc. La question du temps est elle même un problème délicat. Nous pensons l’écoulement du temps comme linéaire, à l’image d’une pendule. Hors nous sommes confrontés à des phénomènes (climat numérique, sociétal) qui évoluent soit en accélération de type exponentiel ou encore chaotiques. Nous ne savons pas penser le temps comme cela. Il existe des synchronisations déroutantes pour l’esprit entre les phénomènes environnementaux et psychiques. Dans les phénomènes ondulatoires classique comme dans la mer par exemple la hauteur de la vague va en diminuant de l’onde, puis la vague qui se forme sur l’onde, puis le clapot sur la vague. En situation chaotique cela n’a plus de sens. La vague scélérate ou soliton, dévastatrice ne permet plus de discerner ce bel équilibre ondulatoire.

Enfin l’échelle de dimensionnement entre global et local comporte beaucoup de barreaux : mondial continent, nation région département bassin de vie communauté de commune, commune, quartier ou hameau, famille, individu, constituants organiques et mentaux de chaque individu. Il nous faut préciser.

Penser agir en complexité

J’ai évoqué cette notion ainsi que celle de pensée systémique, notion biens difficiles à prendre en compte.

Les neurosciences nous révèlent que le petit bébé, même avant sa naissance dispose de compétences cognitives évoluées. A trois mois on peut évaluer sa capacité à penser en « cause/effet », en « vu/caché », en évaluation statistique, etc. Vers 3 ans l’enfant aura quitté le monisme fusionnel puis le dualisme et enfin le système parental trinitaire :Le papa, la maman et lui. La pensée dualiste irrigue toutes les civilisations. La pensée trinitaire structure certaines religions (Dieu-Saint esprit- Jésus, stratégies thérapeutiques (symbolique - imaginaire - réel) et même la gestion de projet (coût - délai - qualité).


« Penser agir en complexité » exige de dépasser ces modes d’élaboration des pensées dualistes ou trinitaires. Le mode de penser cause/effet doit être remplacé par un mode de pensée systémique incluant des boucles de rétroaction et de régulation (exemple la régulation de vitesse dans une voiture ). La pensée complexe exige de dépasser le mode de penser systémique pour prendre en compte les effets chaotiques, les évolutions exponentielles, l’incertitude et l’incomplétude irréductible de notre évolution. La conséquence est d’agir en prenant des risques mesurés certes mais en complète contradiction avec le développement insensé d’une politique ultra sécuritaire.

Comment progresser ?

Certes le chemin est difficile. Cependant la progression est possible, pas à pas quand on ose sortir de ses zones de conforts et de certitudes. Rencontrer l’autre avoir cette curiosité, de découverte et d’acceptation de la différence. Ne pas s’opposer mais s’apposer et essayer de comprendre pourquoi et comment l’autre pense ce qu’il pense. Apprendre à douter, de soi , des autres, de la perception de ce qui serai la réalité, me paraît essentiel. Ma réalité, ma perception du réel est en fait mon cinéma intérieur, une forme d’illusion. Pour grandir en humanité, il nous faut questionner comment «  je pense ce que je pense » et partager ce questionnement. Je trouve cela passionnant, enrichissant et m’ouvre au monde, à la différence.