HALSZKA, le petit raptor

Publié par Esrf Synchrotron, le 10 décembre 2017   2.9k

Halszkaraptor escuilliei est le premier dinosaure prédateur semi-amphibie jamais découvert. C’est grâce aux techniques du synchrotron de Grenoble que les scientifiques ont pu révéler cette nouvelle espèce de dinosaure, dans la revue Nature.

Fossile de Halszkaraptor

Halszkaraptor lors des expériences sur les lignes de lumière du synchrotron de Grenoble

Surnommé Halszka, ce petit prédateur de 75 millions d’années, appartient à la famille des droméosaures, dont il partage la lignée avec le Vélociraptor, bien connu des amateurs du film Jurassic Park. Il en a la queue, mais dans une version plus courte, les pattes arrières et la fameuse «griffe tueuse», une griffe de la patte arrière très développée qui permet à tous les droméosaures d’égorger leurs proies. Mais il a aussi des caractéristiques surprenantes, habituellement absentes chez les dinosaures, qui ont même fait douté les scientifiques de son authenticité. Aux dires mêmes des scientifiques, Halska, est un véritable extraterrestre. «Il faut imaginer un mélange entre un vélociraptor, une autruche et un cygne avec un museau de crocodile et des ailes de pingouin», décrit  Paul Tafforeau, paléontologue au Synchrotron européen de Grenoble (ESRF), coauteur de l’étude.


Découvert en Mongolie, dans le désert de Gobi, l’histoire de ce fossile extrêmement bien préservé est tout aussi étonnante. Comme l’explique Pascal Godefroit de l'Institut royal des Sciences naturelles de Belgique à Bruxelles. "Exporté illégalement de Mongolie, Halszka a séjourné dans des collections privées dans le monde entier avant d'être acquis en 2015, et offert aux paléontologues pour étude et pour préparer son retour en Mongolie".

Afin de vérifier son authenticité, c’est au synchrotron européen de Grenoble, l’ESRF, que ce fossile particulier a été scanné puis reconstruit en 3 dimensions en utilisant la microtomographie multi-résolution par rayons X. « Cette technique est actuellement la méthode la plus performante et la plus sensible pour révéler les plus infimes détails d’un fossile sans l’endommager. Au fil des années, l'ESRF est devenu le leader mondial de l'imagerie X à haute qualité pour ces spécimens inestimables », explique Paul Tafforeau.  

L'équipe scientifique

L'équipe scientifique avec le fossile Halszka sur la ligne de lumière BM05 du synchrotron européen de Grenoble, ESRF

Pour couper court à toute polémique autours de l’authenticité du fossile, les chercheurs ont décidé de livrer en open access toutes les données récoltées. Halszka est le specimen pour lequel le plus grand nombre d'expériences ont été faites sur un seul fossile à l’ESRF.  L’étude a mobilisé toute l’équipe de paléontologues de l’ESRF. «On a passé énormément de temps à essayer de démontrer que c’était un faux, mais nous n’y sommes pas parvenus», précise Paul Tafforeau. « L’imagerie multi-résolution a bien confirmé que le squelette n'était pas une chimère, pas un composite assemblé à partir de différentes parties de dinosaures», explique Dennis Voeten, doctorant à l'ESRF. Pour se faire, "nous avons mis en œuvre de nouvelles méthodes pour l'acquisition et l'optimisation des données de microtomographie, qui ont permis non seulement de confirmer l’authenticité de l'échantillon, mais également de découvrir des informations paléontologiques supplémentaires ", précise Vincent Fernandez, paléontologue à l'ESRF.

L’imagerie X a ainsi pu révéler, avec une très haute précision, les parties du squelette enfouies au cœur de la roche, comme les dents ou des aspects étonnants de la machoire. Comme le souligne Vincent Beyrand de l'ESRF. "Nous avons également identifié un système neuro-vasculaire à l'intérieur du museau qui ressemble beaucoup à celui des crocodiles modernes, ce qui suggère que Halszka était bien un prédateur aquatique.


Grâce à l’imagerie X du synchrotron de Grenoble, comme le résume Andrea Cau, premier auteur de l’étude, paléontologue au Musée géologique Giovanni Capellini à Bologne, Italie « nous avons pu démontrer que les dinosaures couraient, volaient mais aussi nageaient ! ». Et Paul Tafforeau d’ajouter, « On connaissait des dinosaures qui mangeaient du poisson, notamment le spinosaure (celui qui tue le tyrannosaure dans "Jurassic Park 3"), mais on ne pensait pas qu'il pouvaient nager. » Halzska est l’unique représentant d’une forme terrestre qui s’est adapté à l’amphibie. Une première chez les dinosaures, qui nous prouve, une fois encore, que nous avons encore beaucoup à apprendre de ces étranges créatures !

>> Image principale : Reconstruction of Halszkaraptor escuilliei. This small dinosaur was a close relative of Velociraptor, but in both body shape and inferred lifestyle it closely recalls some waterbirds like modern swans. Credit: Lukas Panzarin and Andrea Cau for scientific supervision.