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Mémoires du Futur

De l’intelligence machinique délocalisée du cerveau humain

Publié par Jean Claude Serres, le 13 septembre 2018   3k

Conférence plénière sur l’Intelligence Artificielle – Vers un monde nouveau?

A l’heure du « Big Data » et du « Deep Learning ». Du « Dataïsme » au complexe du « Deep »…

Par Mirta Gordon et Gilles Bisson.

Cette conférence animée par deux personnes vraiment complémentaires a été un vrai régal à suivre. Parmi les points forts que j’ai retenus, il y a la grande qualité pédagogique, la clarté des propos et l’accessibilité bien  que le contenu soit dense et parfois ardu. Il est a noté à propos des « neurones artificiels » utilisés en IA et comme l’a fait remarqué Claude Marti : ils sont très simplistes par rapports aux neurones cérébraux – bipolaire avec seulement deux états stables suite a une somme pondérés d’entrée (barycentre avec seuil de déclenchement). Cependant la grande quantité de neurones artificiels, les nombreuses couches d’interaction entre les entrées et les sorties, la très grande quantité d’exemples utilisés pour l’apprentissage et la puissance disponible de calcul permettent au « deep learning » de produire des résultats surprenant de qualité dans nos Smartphones et micro-ordinateurs (reconnaissance vocale, traduction, …etc).

Les conférenciers ont mis en récit l’émergence et le développement en interactions de l’IA, du numérique et de la puissance des ordinateurs. En particulier la modélisation des algorithmes puis des systèmes connexionnistes est très représentatifs des avancées humaine par à-coups retours et reprises (Cf l’image du monde de Aristote à nos jour). Ce développement est du à l’intelligence humaine individuelle et collective des experts, savants et chercheurs scientifiques dans ces différents domaines. Il est à noter que les avancées technologiques récentes ne sont pas encore explicables scientifiquement et compréhensibles par nombre d’experts eux-mêmes. C’est à la fois une preuve d’humilité (de la part des deux conférenciers en particuliers) et une source d’inquiétude vis-à-vis de la maîtrise sociétale de ces prodigieuses inventions.

Les questions qui taraudent le public averti, les peurs que l’IA génère dans le public non avertis, les menaces comme les opportunités qu’amène l’IA sur le marché public et militaire (et plu globalement la « révolution » numérique) sont fondées et doivent être questionnées dans les différentes dimensions, philosophiques, sociologiques, politiques, psychologiques et cognitivistes. C’est le propre de toute aventure humaine depuis son avènement : la création et l’utilisation des outils précèdent l’adaptation organisationnelle, les apprentissages des utilisateurs, la méthode et l’éthique de l’utilisation de ces outils.

Il peut être intéressant de juxtaposer au récit des « experts inventeurs du numérique » les récits des « experts utilisateurs de certains de ces outils numériques » et aussi les récits des non experts obligés de les utiliser, et des réfractaires à l’avancée du numérique. Quand on lit les recommandations du député et chargé de mission Cédric Villani la question essentielle posée est « comment on avance dans le marché du numérique et de l’IA »et les recommandations répondent à cette question principale. La question du sens n’est pas première.

En moins d’un an, à Grenoble (et Lyon pour une conférence) j’ai pu assister à plusieurs séminaires et conférences sur cette thématique : IA Biennale Arts Sciences, Corps et prothèses, ateliers de réflexions sur la révision de la loi sur la bioéthique, le séminaire de juillet sur intelligence artificielle et naturelle invitant aux différents labos concernés de Grenoble d’évaluer leurs capacité à répondre à l’appel d’offre gouvernemental. Différents conte rendus et réflexions personnelles sont disponibles à partir du lien suivant : lire. J’ai repris et détaillé mon rapport au numérique en tant qu’« expert utilisateur du numérique ».  D’autre part je donne quelques liens utiles : Des sites biens documentés peuvent aider à faire comprendre les enjeux globaux : rapport politique de Cédric Vilani (commande du gouvernement) sites contestatairessites de la sphère moréniènne. Enfin sur You Tub de nombreuses vidéos sont disponibles comme celle de Yann LeCun

Il serait intéressant et utile de proposer à la suite de cette brillante conférence un atelier ou séminaire en deux temps intégration des informations disponibles puis réflexions sur les menaces et opportunité, les apprentissages sociaux à développer  (deux demi-journées par exemples). Cela concerne directement le champ du neurocercle. En effet le cerveau humain, au même titre que l’ensemble du corps humain évolue et se modifie par l’usage des outils. L’humain a délégué ou sous-traiter aux machines l’utilisation de l’énergie animale puis machinique de la vapeur, du pétrole et de l’électricité. Depuis plus d’un demi siècle il apprend à déléguer certaines fonctions intelligentes du cerveau humain à vivre en collaboratif intelligences humaines et machiniques. J’ai personnellement appris à penser via la numérique et les outils de Bill Gates. L’intelligence humaine se transforme au fil du temps de manière collective et individuelle par l’usage des outils, avec des gains et des pertes.