Les interfaces cerveau-machine (ICM), un espoir pour les personnes tétraplégiques ?

Publié par Sandy Aupetit, le 14 avril 2021   1.9k

 "Le futur sera étrange" - Elon Musk lors de la présentation de Neuralink en Août 20201

Depuis la création d’internet et des smartphones, le monde (y compris moi), est forcé de constater que nos technologies se développent de manière exponentielle. Alors je me suis dit : « Quelle sera la prochaine révolution technologique ? ». Puis je suis tombé sur ce que je pensais être impossible : doucement mais sûrement, des entreprises essayent de créer une interface nous permettant d’interagir directement avec des machines, par la pensée. Aujourd’hui je vous propose donc de me suivre dans l’exploration des projets fous de Clinatec, un institut de recherche grenoblois et de Neuralink, l’entreprise made in USA d’Elon Musk.

La première fois que j’ai entendu parler d’interface cerveau-machine, j’ai ressenti ce sentiment étrange, un mélange d’inquiétude et d’étonnement. En réponse à ce sentiment, une seule question m’est venu à l’esprit : «Mais pourquoi on ferait ça ?! ». Probablement car de nos jours pour interagir avec le monde, qu’il soit réel ou virtuel, nous utilisons nos mains, nos yeux, nos jambes… bref, nous utilisons nos sens et notre mobilité. Mais comment faire si vous êtes paralysé ? C’est alors que j’ai trouvé Clinatec et Neuralink. Comme nous pouvons le lire sur leur site, Clinatec souhaite «faire remarcher les tétraplégiques» et Neuralink a pour but initial «d’aider les personnes paralysées à retrouver leur indépendance». 

Ainsi, bien que la structure et les objectifs annexes de ces groupes puissent diverger, Clinatec et Neuralink adoptent la même approche : mettre en place une interface cerveau-machine (ICM). 

Alors, comment ça fonctionne ?

Je vous propose de reprendre les bases : le cerveau. Le cerveau est un organe dont les fonctions reposent sur un réseau complexe de neurones. Ces cellules sont près de 86 milliards dans le cerveau humain, elles ont différentes fonctions mais toutes peuvent communiquer entre elles par des signaux électriques. Chaque neurone peut recevoir des signaux et en créer de nouveaux.

L’enjeu de Clinatec et de Neuralink est alors de connecter un ordinateur à ce réseau de neurones, d’interpréter correctement les informations reçues par l’ordinateur et (pour le cas de Neuralink) de créer de nouveaux signaux à transmettre au cerveau. C’est là que les approches de Clinatec et de Neuralink sont différentes. 

Clinatec : "Demain, faire remarcher les tétraplégiques"

Clinatec bénéficie depuis sa création d’une expertise unique. Elle a su développer cette expertise et cette dernière porte ses fruits de manière impressionnante ! Pour réaliser l’exploit de faire marcher un tétraplégique, Clinatec a conçu deux implants nommés WIMAGINE. Ces derniers détectent les informations cérébrales et les transmettent à un exosquelette. Les implants sont faits de titane. Chaque implant présente 64 capteurs qui s’implantent sur la dure-mère de part et d’autre du crâne au-dessus des zones cérébrales à l’origine du mouvement. En 2017, après que Clinatec ait reçu l’autorisation d’opérer 5 patients, le dispositif est implanté pour la première fois. La première opération se soldera par un échec. Mais la seconde opération, elle, est une vraie réussite et depuis le patient, Thibaut 29 ans, vient régulièrement à Clinatec pour apprendre à marcher avec un exosquelette qu’il contrôle par la pensée.

Implant WIMAGINE - Crédits  : Clinatec (source)

Neuralink : "Un lien direct entre le cerveau et les technologies de tous les jours"

Neuralink a aussi créé un implant : « [Le Link] a la forme d’une large pièce » explique Elon Musk. L’épaisseur est un peu plus fine que celle du crâne, ainsi Neuralink souhaite connecter les 1024 capteurs sur des zones précises du cerveau, et insérer la partie la plus volumineuse de la puce dans le crâne. Le dispositif serait alors invisible, il se rechargerait par induction et aurait une autonomie d’une journée. Si un autre dispositif est implanté en dessous de la zone où la moelle épinière a été endommagée, il sera possible de faire un « shunt neurologique » et ainsi restaurer la motricité d’une personne tétraplégique.

Neuralink a présenté publiquement leurs premiers résultats, obtenus en implantant leur dispositif sur deux truies, avec l'aide d'un robot chirurgien de haute précision. L’entreprise voulait ainsi montrer que le dispositif peut être implanté et retiré sans influencer la qualité de vie. Dans les commentaires du live Youtube de l’événement, on peut percevoir de la part des internautes, autant d’engouement que d’inquiétude.

Aujourd'hui, Neuralink attend l’approbation de la FDA (l’administration américaine des aliments et des produits médicamenteux) pour commencer ses essais cliniques chez les hommes.

Implant Link - Crédits : Neuralink (source)

A quoi ressemblera le futur ?

Ces projets sont impressionnants, verra-t-on des tétraplégiques marcher à bord d’exosquelettes futuristes dans les rues du monde de demain ? Irons-nous encore plus loin, avec des implants qui nous permettront de contrôler notre smartphone par la pensée et potentiellement de pouvoir interagir avec les futures intelligences artificielles ? Les possibilités semblent illimitées, et le monde en serait sans l’ombre d’un doute, bouleversé. 

Je ne sais pas si les projets de Clinatec et de Neuralink fonctionneront, si vraiment nous verrons des anciens paralysés marcher à nouveau, si nous pourrons envoyer des messages par la pensée etc. Mais si c'est le cas, le futur sera vraiment très étrange.

Article rédigé par Pierre Germain


Cet article a été rédigé par les étudiants de licence suivant l'enseignement transversal "Sciences, journalisme et réseaux sociaux" proposé à l'Université Grenoble Alpes (UGA). Cet enseignement est encadré par Sandy Aupetit, chargée de médiation scientifique à l'UGA et Marion Sabourdy, chargée des nouveaux médias à La Casemate. Suivez l'actualité de l'ETC sur Twitter !