À pattes de ver et de velours

Publié par Guilhaume Boo, le 9 août 2023   710

Êtes-vous un ou une adepte de ver, de limace ou de mille-patte ? Non ? Bizarre, pourtant des animaux pourraient bien vous réconciliez avec eux ! Car comment ne pas craquer devant les onychophores ou autrement dit "vers de velours" ?

[Chronique] Vous avez dit animaux ? #3 :

À pattes de ver et de velours

I/ Nom de code : Onychophore

        Les embranchements, du règne animale ne sont pas tous égaux en terme de taille. Ainsi, aux cotés des mollusques et des arthropodes, on retrouve celui des onychophores. Surnommés "vers de velours" à cause de la texture de leur peau, les onychophores rassemblent à peine 200 espèces. Ils sont parfois appelés "Péripates".

Peripatoides novaezealandia
Crédit : Frupus/ flickr

          L'embranchement des onychophores se divisent en deux sous-groupes :  les Péripatidaes et les Péripatopsidaes, certe un peu plus compliqué à prononcer. Ces deux sous-divisions sont assez proches dans leurs caractéristiques. Leur formation est dû à un isolement géographique : des individus ont été séparé du reste de l'espèce et ont évolué indépendamment, lors de la fracturation du super-continent Gondwana il y a 160 Ma. Ce qui veut dire que les onychophores sont présents depuis un petit bout de temps ! A tel point qu'il porte la fameuse appellation de fossiles vivants, sur laquelle on reviendra dans un futur épisode dans cette chronique.

II/ Un ver à pattes, à antenne et de velours ???

Aspect générale : un ver qui n'en est pas un

Un onychophore du genre Ooperipatellus trouvé en Tasmanie                 
Crédit : Marshal Hedin/ commons.wikimedia.org

         Même si l'on parle de "vers" de velours les péripates ne sont pas des vers. Ce sont des animaux au corps long qui peut atteindre 22 cm pour les plus grands. Ce dernier est cylindrique et mou. Leur peau peut arborer tout un panel de couleurs plus ou moins vives. Elle est parsemée de détails, de pores et de reliefs qui lui donne cette impression de velours si l'on passait la main dessus, mais pas sur que cela plaise à l'animal. De plus, même si on ne dirait pas les vers de velours ont un corps segmenté. Cela veut dire qu'il est divisé en anneaux rattachés les uns derrières les autres. Ils possèdent un système nerveux mais pas respiratoire, ils se contentent faire de la diffusion par la peau.

Locomotion : une patte après l'autre

         Les onychophores sont munis d'une succession de pattes tout le long de leur corps. Leur nombre peut aller de 12 à 42.  Celles-ci s’appellent  des lycopodes et possèdent des petites griffes rétractables. Comme le corps des onychophores est mou, ces derniers ont ce que l'on appelle un squelette hydrostatique. Les onychophores sont des invertébrés, ils n'ont donc pas de squelette interne, ni externe d’ailleurs. Ils obtiennent alors une forme de rigidité en remplissant certaines de leurs cellules d'eau qui vont gonfler et durcir, c'est ce que l'on appelle l'état de turgescence. C'est ainsi que les vers de velours maintiennent leurs pattes et peuvent se mouvoir en marchant.

Peritpatoides novaezealandiae
Détail des lycopodes de Peritpatoides novaezealandiae
Crédit : Frupus/ flickr

Observer le monde qui les entourent

        Pour pouvoir se repérer les onychophores disposent d'une multitude d'outils. Bon, ils possèdent sur leur tête des yeux simples, c'est mignon mais ils ne servent pas grand chose pour eux puisqu'ils vivent la nuit. En réalité, leur corps est parsemé d'une grande quantité de récepteurs, et notamment sur leur deux antennes sur la tête. De plus autour de la bouche, ils possèdent également des récepteurs gustatifs pour savoir ce qu'ils mangent.

Leucopatus anophtalmus et ses antennes
Crédit : Shahan Derkarabetian/ commons.wikimedia.org

III/ Alimentation

        Si mignon, les onychophores sont carnivores. Sur leur face ventrale, ils possèdent un bouche circulaire, entouré de lèvres goûteuses, de papilles, et de dents tout droit sorti d'un ver de Dune. Les onychophores mangent des invertébrés : des criquets, etc. Mais comment s'y prennent-ils avec leur apparence si molle pour chasser ? Eh bien les onychophores sont ce que l'on appelle des "prédateur d'embuscades". De chaque côté de leur bouche, ils possèdent deux glandes. Lorsqu'ils ont détecter leurs futurs repas, ses glandes vont éjecter un filet de "glue" sur la pauvre proie. Ce jet, très rapide, peut aller jusqu'à 15 cm. La substance est une sorte de colle qui va les empêcher de s'enfuir. Le ver de velours n'a plus qu'a injecter ses enzymes digestives dans sa proie et en aspirer le contenu. Maintenant que la magie est partie, allons voir où ils vivent et comment ils se reproduisent.

A droite : Détail de la bouche d'Euperipaoides rowelli et à gauche : Un Onychophore en plein repas, on distingue les filets de glue collante sur la feuille et la proie, ici un criquet
Légende de la première image : lp : papille gustative, to : langue, at : antenne, sp : glandes ejectrices, jw : mâchoire, ey : yeux,  dp : papille dermique, lp : premières pattes, ts : langue sensitive et Is : lèvre sensitive   

Crédit :a droite : Christine Martin et Georg Mayer/ commons.wikimedia.org   et a gauche : Crédit : Diego Tirira/ commons.wikimedia.org                                                                                

IV/ Reproduction et écologie

       Les onychophores sont des espèces à reproduction sexuée: il y a des individus mâles et femelles qui vont se rencontrer pour se reproduire. Cependant, certaines espèces sont hermaphrodites, elles peuvent changer de sexe, et d'autres peuvent se reproduire par parthénogenèse. La parthénogenèse, c'est lorsque les femelles engendrent toutes seules une nouvelle individu. Oui "une" car il s'agit en réalité d'un clone identique en tout point. On retrouve ce procédé chez d'autres espèces comme les varans de Komodo ou certains requins.

Les femelles Varanus komodensis pratique la parthénogenèse et des cas de parthénogenèse ont été observé chez des femelles requins-marteau en captivités                                                                          
Crédit : Charles J.Sharp/ commons.wikimedia.org                                  Crédit : Guillaume Baviere/ flickr.com

      Les vers de velours sont présents uniquement dans l'hémisphère Sud, dans des milieux humides tel que des forêts ou des prairies. On retrouve la majeure partie des espèces en Amériques du Sud et en Nouvelles-Zélande.

Conclusion

        Si nos définitions conventionnelles des animaux sont souvent bien ancrées, certains ne cessent de les remettre en cause. Ainsi les onychophores sortent des sentiers battus avec leurs caractéristiques chimériques comparable au très célèbre ornithorynque. Cela rappelle qu'il est important de ne pas considérer des animaux uniquement de part leurs apparences ou leurs noms populaires, au risque de mal les classer. Et pourtant, ces chimères sont pour certaines centrales dans la phylogénie du règne animale ! La place des onychophores, bien qu'un embranchement à par entière, ce qui n'est pas rien, est toujours débattus dans la communauté scientifique. Car il pourrait en effet être de très proches parents des arthropodes et des tardigrades ! Alors ne les laissons pas de côté et intéressons nous à tout ce qu'ils peuvent nous apporter, mais en les laissant tranquilles bien sûr.

Boo Guilhaume


Vous avez dit animaux ? 

      Au cours de cette chronique, je m'amuserai à vous présenter les différents embranchements du règne animal. Qui les constitues et quelles sont leurs caractéristiques ? Si on connait tous des groupes comme les mammifères, la diversité du règne animal s'étend bien au delà ! Alors partons à la découverte de tous ces embranchements, et des petites (ou pas) bêtes qui les constituent.

Retrouvez les autres épisodes de cette chronique : 


Crédit photo introduction : SHVETS production/ pexels.com/ modification par Guilhaume Boo