L'épopée norvégienne continue : arrivée à Skibotn

Publié par Anne Vialatte, le 2 mars 2016   3.1k

Suite des aventures de nos chasseurs d'aurores boréales. Après Mathieu, qui nous a raconté le voyage Grenoble > Tromsø hier (lire l'article), c'est au tour d'Anne Vialatte, qui nous présente la première journée sur place.

Après une bonne nuit de sommeil (bien que peut-être un peu trop courte…), on entame aujourd’hui une journée surtout « logistique » : récupération et transports des instruments.

Nous commençons par aller récupérer la camionnette de location, avec un coffre de 6m3, le volume minimum afin de transporter les deux instruments (SPP + Premier Cru) et nos bagages. Nous rejoignons ensuite un collègue norvégien à l’Université de Tromsø afin de récupérer Premier Cru, notre spectro-polarimètre. On charge d’abord la « bête » de 150 kg dans la camionnette, puis remettons la caisse de SPP et autres caisses de matériel, avant de caler le tout avec nos valises, sacs à dos, duvets, etc.

C’est ainsi vers 11h15 que nous prenons la route pour aller à l’Observatoire de Skibotn, où nous resterons pour la semaine. Skibotn est un petit village en bordure de fjord, situé à environ 120 km de Tromsø. Le timide soleil de mars nous permet de profiter du magnifique paysage, chose qui nous avait été impossible lors de notre dernière mission en décembre 2014, où cette fois nous n’avions pas du tout vu le soleil se lever.

La route est très bien dégagée, il ne reste de la glace qu’en quelques endroits seulement. Même le tout petit chemin qui mène à l’observatoire est très bien déblayé, nous n’avons donc aucun problème pour y faire monter la camionnette. C’est un endroit superbe. Perdu au milieu de la forêt, entouré par les montagnes, on se trouve vraiment au milieu de nulle part.

L'Observatoire de Skibotn

A l’intérieur on y trouve une « salle d’opérations », salle de laquelle on va piloter les instruments et ranger tout le matériel. De l’autre côté du couloir se trouvent ensuite la partie de vie, avec la cuisine, le petit salon et les 6 chambres. Je pense que le mot décrivant le mieux l’atmosphère de cette petite maison est « cosy ». On s’y sent vraiment bien, il ne fait pas froid et la déco, faite par des générations d’astronomes amateurs est, évidemment, sur le thème de l’espace.

La cuisine!

On accède au toit du bâtiment par un escalier extérieur. Sur le toit se trouve la coupole abritant le deuxième plus gros télescope de Norvège ! Mais, plus important, on y trouve aussi la terrasse, notre endroit de prédilection pour regarder les aurores :)

Après avoir sorti nos affaires et pris un rapide repas, on commence par installer le pied qui va soutenir Premier Cru. Vient ensuite le travail plus physique de déneiger et surtout « déglacer » l’escalier menant au toit, l’accumulation des deux rendant l’ascension périlleuse. Soudainement il ne fait plus si froid ! La température est d’environ -2°C, mais le vent souffle, donnant alors une température ressentie d’environ -8°C. Ce phénomène nommé le « windchill » est bien connu des montagnards ;)

On profite alors du jour restant pour faire passer les câbles d’alimentation et ethernet de l’instrument à la salle d’opérations. Pour cela, le moyen le plus simple est en fait de les faire passer… par le toit ! Le télescope étant relié à des ordinateurs dans cette même salle, des trous dans le plafond ont déjà été réalisés, et permettent de faire passer aisément les nôtres.

L'Observatoire, avec la tente où seront stockés nos instruments.

On attend ensuite l’arrivée de nos derniers collègues avant de placer Premier Cru sur son pied, la manœuvre étant trop périlleuse pour être réalisée seulement à trois. La boite pèse près de 100 kg, et fait environ 2 m de long, pour 1 m en largeur et hauteur. Ils ne tardent pas à arriver, mais le temps de les accueillir, la nuit est déjà tombée. C’est donc à la lumière de la frontale que l’on installera l’instrument, ce qui n’est pas tellement un problème.

Après le repas du soir, on sort voir si le ciel ne se serait pas par hasard éclairé d’une belle lumière verte, mais malheureusement non. La moitié du ciel est complètement cachée par les nuages, et sur l’autre partie, on ne distingue quasiment rien. Il y a bien une aurore, mais tellement faible en luminosité que nos yeux n’arrivent même pas à voir la couleur verte. On voit ainsi uniquement une « tache blanchâtre », très très faible. Si on ne savait pas que c’est une aurore, on croirait que c’est simplement un nuage…

Un peu déçus, on rentre donc faire ce que tout chercheur qui se respecte fait de son temps libre : répondre à ses mails en retard ! ;)